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Revue Alternatives Sud, vol. XIII, n° 4 - éditorial

Dynamisme et défis des mouvements sociaux dans le Sud

François Polet (CETRI)

lundi 7 mai 2007, mis en ligne par Centre Tricontinental

[>> Voir le sommaire du numéro.]

Ce numéro hors-série de la collection Alternatives Sud a pour ambition d’offrir un
panorama des mouvements sociaux qui, au Sud, luttent contre l’injustice sociale et l’arbitraire
politique. Cet état des lieux se veut représentatif, bien que non exhaustif, de la diversité de ces
résistances citoyennes, de leur forme, de leur ampleur et de leurs effets. Il rassemble quelque
35 contributions portant sur des réalités nationales et régionales d’Amérique latine, d’Afrique
et d’Asie. Nous avons demandé aux auteurs, originaires des pays traités dans leur grande
majorité, de porter un regard engagé, mais lucide, sur les contraintes et le dynamisme de ces
luttes sociales.

Comprendre les mouvements sociaux du Sud - les conditions de leur émergence, leurs
stratégies et leurs portées - demande avant tout de porter l’attention sur la spécificité des
contextes sociopolitiques, institutionnels et économiques dans lesquels ils s’enracinent. La
diversité des situations s’impose à l’observateur – quoi de commun entre le Venezuela
« bolivarien » et les monarchies du Golfe ? –, au point que la tenue d’un discours général sur
« les mouvements sociaux du Sud » semble difficile à concevoir. Reconnaissons cependant un
grand trait commun aux pays du Sud, qui n’est pas sans conséquences sur l’évolution de leurs
sociétés civiles : aucun d’eux n’échappe à deux tendances qui correspondent à deux discours
forts de la communauté internationale - l’impératif démocratique d’une part et la libéralisation
des marchés de l’autre. Bien sûr, comme toutes les tendances, celles-ci se déclinent et se
combinent différemment d’un pays ou d’une région à l’autre, et sont objet de résistances et
d’instrumentalisations diverses par les acteurs sociaux et institutionnels, internes et externes.

De la vague de démocratisation à la guerre contre le terrorisme

Retour sur les années 1980 et 1990. On assiste à cette époque dans les pays du Sud (et
de l’Est) à un glissement général des régimes autoritaires vers des systèmes officiellement
démocratiques. En moins d’une vingtaine d’années, tel un raz de marée vertueux, la
« troisième vague de démocratisation » touche les trois continents du Sud : Amérique latine
(Argentine, 1982 ; Brésil, 1984 ; Uruguay, 1985, etc.), Asie (Philippines, 1986 ; Thailande,
1992 ; Indonésie, 1998, etc.) et Afrique (Bénin, 1990, Mali, 1991, Afrique du Sud, 1994, etc.),
à l’exception notable et abondamment commentée des pays du Monde arabe. [1]

Cette contagion démocratique n’est pas indépendante des mutations de
l’environnement international. La fin de la guerre froide et la reformulation du discours
hégémonique autour des principes de la démocratie et des libertés économiques invitent les
chancelleries occidentales à mettre de l’ordre dans leurs relations et à retirer ou conditionner
leur soutien à des régimes devenus infréquentables. [2] Mais, dans de nombreux pays, l’usure
des dictatures est aussi la conséquence de crises économiques, financières ou sociales qui minent un de leurs principaux piliers : la prospérité relative d’une partie de la population. [3]
Elle est enfin, et surtout, le résultat de l’essor de mouvements démocratiques nés au sein de la
société civile qui vont saper la légitimité des régimes autocratiques en attisant le rejet de
l’arbitraire, en cultivant l’adhésion populaire au projet démocratique et en organisant les
mobilisations sociales qui déstabiliseront les pouvoirs en place.

Avec plusieurs années de recul cependant, il semble que la portée de cette vague de
démocratisation doive être relativisée. Comme le soulignait le rapport du PNUD de 2002,
« sur les 81 pays qui ont entrepris de se démocratiser, 47 seulement sont considérés comme
pleinement démocratiques ». En Afrique en particulier, nombre de pouvoirs arrivent à gérer
l’existence d’un processus démocratique formel à destination de l’extérieur (tenue d’élections
libres, multipartisme et liberté de la presse) avec un verrouillage presque total de la vie
politique interne. [4]

Plusieurs études relèvent également une désillusion vis-à-vis de la démocratie, voire
un discrédit, liés essentiellement au fait que l’ouverture politique n’a pas entraîné les progrès
sociaux escomptés. De fait, cette période de démocratisation est aussi celle du tournant
économique libéral et des deux « décennies perdues » en termes de développement. Difficile
d’applaudir les alternances réussies lorsqu’on a le ventre creux et que le chômage, les
inégalités et l’insécurité ne cessent de progresser autour de soi.

Ce tableau contrasté est encore assombri par le climat international sécuritaire qui
prévaut depuis le 11 septembre. La communauté internationale est devenue moins regardante
sur les modalités de la « gestion interne » des droits humains dans les pays qui coopèrent
pleinement à la guerre contre le terrorisme. Cette évolution contribue à modifier les rapports
de force internes au détriment des groupes qui luttent pour un approfondissement du
processus démocratique. Quant elle ne donne pas aux pouvoirs de nouvelles marges
législatives et juridiques pour intimider, voire « terroriser », les éléments qui menacent la
stabilité de leur hégémonie politique.

De l’ajustement structurel à la lutte contre la pauvreté

L’autre tendance mondiale permettant de mieux cerner l’évolution de l’environnement
au sein duquel naissent les mobilisations sociales est celle de l’intégration des pays en
développement à l’économie mondiale. L’argumentaire des bailleurs de fond est désormais
bien connu : les politiques d’austérité budgétaire, de privatisation des services publics,
d’ouverture aux échanges, aux investissements étrangers et aux flux de capitaux doit
dynamiser des économies nationales inhibées par les régulations et les prélèvements les plus
divers. Après un premier moment d’adaptation sans doute douloureux, l’ensemble de la
population va logiquement profiter de la stimulation de la croissance, de la création de
nouvelles activités et de nouveaux emplois, de la baisse du prix des marchandises, de
l’extension et de l’amélioration de la qualité des services d’éducation, de santé, de distribution
d’eau, etc.

On connaît aujourd’hui l’étendue de l’écart entre la théorie et la réalité. Bien que leurs
effets ne puissent être appréhendés indépendamment des facteurs démographiques et environnementaux et des stratégies des pouvoirs nationaux [5], les mesures d’ajustement ont
indéniablement contribué à l’informalisation de la vie économique et à la précarisation des
conditions d’existence de pans entiers des populations. Si les premiers signaux de malaise
social sont ignorés ou rangés au rayon des conduites archaïques, dans un contexte idéologique
qui voit la majorité des élites du Sud se convertir aux principes de l’économie de marché, par
conviction ou opportunisme, l’étendue des dégâts sociaux et la montée en puissance des
protestations sociales vont venir à bout de l’optimisme ambiant. La Banque mondiale et les
experts en développement qui avaient orchestré l’élaboration et la diffusion du « modèle »
sont eux-mêmes forcés de réviser leur diagnostic et de reconnaître que non seulement les
« perdants » de la mondialisation sont plus nombreux que prévus – la majorité dans beaucoup
de pays – mais que cette situation semble devoir perdurer dans le temps.

Dès le milieu des années 90, le débat au sein de la communauté des théoriciens du
développement ne porte plus tellement sur la réalité du rapport entre libéralisation et
paupérisation, mais bien sur le jeu de facteurs spécifiques qui expliquent ces crises sociales
successives : les prescriptions macro-économiques sont-elles mal conçues ou est-ce le cadre
institutionnel au sein duquel elles ont été adoptées qui pose problème ? Le courant dominant
de la coopération internationale va opter pour la deuxième explication : pour que l’ajustement
des économies joue en faveur des plus pauvres, il faut d’une part qu’il soit mieux encadré – il
faut réformer les institutions –, d’autre part qu’il soit accompagné – il faut mettre en place des
programmes sociaux de compensation. [6]
Cette « réforme de la réforme » comme certains l’ont appelée ne touche pas le noyau
des mesures de l’ajustement structurel, mais vise à le rendre socialement et politiquement
viable sur le long terme. Elle s’assortit d’une contre-offensive rhétorique redoutable : les
pauvres n’étant pas tant victimes des ajustements structurels que de l’inaptitude des
gouvernants à gérer proprement l’environnement institutionnel de ces réformes, la poursuite
des réformes « améliorées » se fera donc au nom des pauvres et avec la participation de ces
derniers.

Les Cadres stratégiques de la lutte contre la pauvreté (CSLP) et les Objectifs du
millénaire pour le développement (OMD) incarnent ce changement de paradigme. Chacune de
ces initiatives insiste d’une part sur les notions d’appropriation (ownership) par les
gouvernements et de participation de la société civile, d’autre part sur l’importance de
concentrer les ressources budgétaires sur des programmes d’éradication de la pauvreté. Elles
prétendent réconcilier la communauté des donneurs, en particulier la Banque mondiale, les
gouvernements et les organisations de la société civile représentatives des pauvres. Qu’il
s’agisse de « contre-feux » allumés tactiquement par des institutions en perte de légitimité ou
de la dernière manifestation du volontarisme naïf qui habite la communauté du
développement, le consensus international contre la pauvreté a jusqu’à présent plus aidé à occulter l’asymétrie des rapports entre nations et à l’intérieur de celles-ci qu’à infléchir les
politiques créatrices d’inégalité et de pauvreté.

Conditions d’émergence des mobilisations

On est frappé par la similarité des scénarios socio-économiques qui ont prévalu dans
les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. Dans le désordre et de manière non
exhaustive : la fin des subventions sur les produits de base (lait, pain, huile, etc.) et l’élévation
du prix des services publics causée par leur privatisation ont entraîné une baisse brutale des
niveaux de consommation et de bien-être des populations urbaines. Cette même privatisation
des services et des entreprises publiques s’est traduite par des dégraissages systématiques qui
ont durement touché les classes moyennes : du jour au lendemain, des milliers de
fonctionnaires invités à créer leur propre entreprise (le volet « réinsertion socio-économique »
de l’ajustement) ont dû se reclasser dans les petits métiers (gardiens de nuit, chauffeurs de
taxi, etc.) ou le commerce informel. La catégorie des travailleurs de l’industrie n’a pas été
épargnée : les entreprises actives dans des secteurs ne bénéficiant pas d’avantages comparatifs
ont dû s’adapter (en licenciant massivement et en flexibilisant à outrance) ou disparaître. Les
catégories socioprofessionnelles qui ont résisté ont été assimilées à des groupes corporatistes,
arc-boutés sur la défense de leurs privilèges et bloquant les réformes – notamment celles du
marché du travail - devant profiter aux « pauvres ».

Dans les campagnes, les effets conjugués de la disparition des mécanismes publics de
soutien à la production et à la distribution et de la baisse des prix, conséquence de l’ouverture
aux importations, ont soumis les petits producteurs à des pressions insupportables. Incapables
d’écouler leur récolte à des prix rémunérateurs, ils ont été obligés de vendre leur exploitation
pour rembourser leurs emprunts et de chercher du travail dans les grandes exploitations ou
dans les zones franches (maquiladoras et autres). Quand le désespoir ne les a pas acculés à la
plus terrible des fuites : le suicide. [7]

Les communautés rurales sont par ailleurs régulièrement spoliées dans le cadre des
grands projets d’infrastructure (barrages, routes, aéroports, oléoducs, etc.), de l’exploitation
industrielle des matières premières (déforestations, mines, pétrole), de l’implantation des
multinationales, des stations touristiques et de l’expansion urbaine indissociables d’un
développement économique « moderne ». Elles en subissent l’essentiel des conséquences
négatives (expulsion, pollution, destruction des ressources naturelles) sans participer à leurs
bénéfices.

Cette dégradation multiforme des conditions de vie a suscité un large éventail de
résistances par les groupes concernés. Mais, contrairement à ce que suggère une vision par
trop mécaniste des rapports sociaux, le passage à la contestation ouverte des politiques
concernées n’est pas automatique. La lutte pour la survie quotidienne, immédiate, ne
prédispose pas à s’engager dans des luttes sociales dont les bénéfices matériels peuvent
paraître aléatoires et éloignés. La remarque d’Yves Chouala concernant le Cameroun peut
s’étendre à bien d’autres pays : « l’orientation majeure vers l’auto prise en charge réduit de
manière substantielle la conscience et la capacité politiques de la société civile
camerounaise, qui s’affirme aux antipodes d’une démarche de critique et d’interpellation des
dirigeants. »

A ces pressions matérielles viennent s’ajouter le contexte sociopolitique fortement
hiérarchisé et la culture politique de sujétion qui prévalent dans de nombreuses régions. Sans
verser dans le déterminisme culturel, il faut savoir tenir compte de la pesanteur historique de ces rapports de crainte et de respect vis-à-vis de l’autorité publique, en particulier dans les
pays où l’ouverture politique n’est pas le résultat d’un mouvement citoyen large mais d’une
stratégie de démocratisation « par en haut ». Les « patrons » locaux et les big men restent
généralement les pivots de la vie politique locale : ce sont eux qui d’une part dispensent les
protections et les favores, d’autre part orientent les votes et les comportements politiques. [8]
L’action contestataire entraîne souvent une mise sous tension du réseau clanique ou familial
de solidarité et des allégeances multiples qu’il implique.

Mais cette vision doit à son tour être contrebalancée. Même dans les contextes les plus
autoritaires, dans lesquels les canaux de représentation et d’expression des intérêts sont
limités et strictement encadrés, toute une gamme de protestations populaires échappe au
quadrillage politique et policier des dirigeants. Elles s’éloignent généralement des
représentations occidentales du mouvement social et prennent la forme d’irruptions de
violence imprévisibles et incontrôlables – pensons aux « émeutes du pain » à Tunis en 1978,
aux « émeutes de la vie chère » au Maroc en 1984 ou au « Caracazo » dans la capitale
vénézuélienne en 1989 – ou, à l’opposé, de résistances quotidiennes « infrapolitiques » :
empiètements divers, raccordements illégaux, boycott, déprédations, etc.

Il faut aussi un minimum de foi dans la capacité du système démocratique à intégrer
les demandes sociales exprimées par la population pour se lancer dans une action collective
revendicative. Or, ce minimum fait de plus en plus défaut dans certains pays. Beaucoup ont
l’impression que rien n’a changé, ou que « tout a changé pour que rien ne change » : la
démocratie est tout simplement le nouveau cadre au sein duquel les mêmes se disputent le
pouvoir en bloquant toute perspective de changement économique et social. Cette
« désillusion démocratique », qui vire au cynisme lorsque le train de vie des dirigeants est mis
en regard de la progression des précarités, incite à bouder les élections, à se replier sur la
sphère privée, à privilégier des stratégies individuelles de promotion sociale, en émigrant ou
en intégrant les réseaux et les partis qui permettent d’obtenir sa part du gâteau.

Dans ces contextes difficiles, le travail de politisation – apprendre à faire le lien entre
des situations individuelles et collectives vécues et les décisions prises au sein du champ
politique – et d’organisation des catégories les plus vulnérables est long et tortueux. L’action
des militants, véritables « entrepreneurs de mobilisation », est donc décisive pour qu’une
contestation structurée émerge de l’insatisfaction sociale. [9]

Stratégies et efficacité politique

Quelles sont les stratégies utilisées par les mouvements sociaux pour peser sur le cours
des événements et infléchir les politiques qui mettent à mal leurs conditions d’existence ?
Elles ne peuvent être comprises qu’en étant replacées dans le double contexte de forte
asymétrie qui prévaut à l’intérieur du pays – les groupes pénalisés par les politiques de
développement sont souvent l’objet d’une marginalisation politique, dans le sens où leur
opinions et leurs intérêts sont mal représentés au sein des instances de décision (parlements,
gouvernements) – ainsi qu’entre le pays et les institutions étrangères (institutions
internationales, pays du Nord et transnationales) qui influent sur les orientations des politiques
nationales.

Ces stratégies dépendent de facteurs aussi variés que la perception qu’ont les acteurs
sociaux de la conjoncture politique et des rapports de force, des ressources qu’ils ont à leur
disposition, de la structuration du champ militant et des stratégies des pouvoirs en place pour
canaliser ou neutraliser les revendications populaires. L’efficacité politique des mouvements
sociaux repose en particulier sur leur capacité à répondre à deux défis : celui des
convergences entre acteurs sociaux et celui du rapport entre société civile et société politique.

Le défi des convergences

Un des choix stratégiques les plus logiques et les plus payants pour les groupes
mobilisés consiste à unir leurs forces et leurs voix aux mouvements qui, dans la région, le
pays, luttent sur des enjeux proches ou similaires, afin que la contestation gagne en ampleur,
en visibilité et en résonance politique. Aussi nécessaires puissent-elles paraître, ces
convergences ne vont cependant pas de soi. Tout d’abord, elle demande aux personnes
engagées de prendre un minimum de recul par rapport à leur propre situation problématique,
aussi pressante soit-elle, pour envisager ce qu’elle a de commun dans ses origines avec la
situation d’autres groupes.

Cette « montée en généralité » s’opère notamment à travers la construction
symbolique d’un « cadre », d’une identité ou d’un adversaire en commun. La genèse de
l’Assemblée des pauvres, en Thaïlande, est illustrative de ce type d’évolution stratégique.
Dans les termes de Vanida Tantivithapitak, un de ses animateurs : « En unifiant des réseaux
actifs sur des problèmes différents, l’idée était de se donner une plus grande capacité, en vue
de résoudre tous ces problèmes. Pour ce faire, il fallait penser à un symbole de mouvement
commun pour unifier tous ces réseaux et solliciter le soutien et la sympathie du grand public.
Le concept de « pauvre » devait nous aider à expliquer les raisons de notre appauvrissement
en pointant notre doigt vers l’Etat et les multinationales. C’est de cette manière que nos luttes
constantes et nos manifestations ont pu être comprises et ont gagné en légitimité » (Prasartset,
2004).

Il arrive aussi que ces rapprochements entre acteurs sociaux soient aussi rendus
difficiles, voire impossibles, du fait des clivages idéologiques et partisans qui fragmentent le
champ militant et des logiques concurrentielles entre organisations qui en découlent. Cet
éclatement des forces militantes est particulièrement perceptible dans le cas des mouvements
de sans-emploi piqueteros en Argentine ou des mouvements de masse en Inde. Si ceux-ci
marchent régulièrement côte à côte face à l’adversaire commun, les logiques partisanes ou la
rigueur doctrinale reprennent souvent le pas sur la volonté de démarche collective. A
l’inverse, le mouvement égyptien « Kifaya », en Egypte, qui réunit des nassériens, des
libéraux, des marxistes et des frères musulmans dans des manifestations publiques contre le
régime de Moubarak, est le résultat constructif et stimulant d’un long processus de
dépassement des clivages traditionnels rendu possible par un rejet commun de l’arbitraire
politique.

Le défi des convergences concerne également la construction de passerelles entre
mouvements de pays différents. L’internationalisation des luttes et l’émergence du
mouvement altermondialiste sont la suite « logique » de la prise de conscience par des acteurs
sociaux toujours plus nombreux qu’une part de plus en plus large des politiques qui affectent
les modes de vie locaux sont le résultat de décisions prises en dehors du cadre national, au
sein d’institutions internationales comme la Banque mondiale, le Fonds monétaire
international ou l’Organisation mondiale du commerce. Au-delà, du développement
impressionnant des forums sociaux mondiaux, notons l’émergence et la structuration
progressive, bien qu’inégale, d’une opposition sociale à l’échelle régionale. Si les
convergences continentales contre la Zone de libre-échange des Amériques ont, à raison,
beaucoup fait parler d’elles, il y a lieu d’accorder une attention toute particulière à l’existence
de réseaux asiatiques contre l’action de la Banque asiatique de développement et la
multiplication des rencontres entre mouvements sociaux africains sur des thèmes tels que la
dette ou les accords de libre-échange.

Cette convergence transfrontalière a elle aussi ses obstacles, comme l’illustrent des
phénomènes aussi différents que les poussées de nationalisme qui agitent régulièrement
certaines sociétés civiles. [10], le déphasage entre l’agenda « économique » du mouvement
altermondialiste et l’agenda « politique » des organisations démocratiques arabes, ou encore
le manque de représentativité (l’élitisme ?) de la participation aux différents forums sociaux
internationaux.

Le défi du rapport au politique

Le type de rapport que les mouvements sociaux entretiennent avec les acteurs de la
sphère politique institutionnelle constitue un autre aspect déterminant des dynamiques de
mobilisation sociale. Pour la majorité des acteurs sociaux en lutte, il s’agit de s’allier avec les
individus et les partis susceptibles d’influer directement ou indirectement sur le processus de
décision dans un sens qui leur soit favorable. Dans son article sur les Philippines, Teresa
Tadem relève l’exemple de ces paysans de l’industrie légumière de la province de Benguet,
qui formèrent une alliance avec les élus locaux pour empêcher que le gouvernement central ne
libéralise le marché et que leurs emplois ne soient balayés par l’importation de légumes bon
marché.

Cet exercice, délicat dans tout système démocratique, l’est d’autant plus dans des Etats
historiquement « importés » ou « imposés » de l’extérieur, dans lesquels les partis s’assimilent
moins à des organisations représentatives d’intérêts ou d’option idéologiques qu’à des
machines électorales créées de toutes pièces par les fractions de l’oligarchie qui se disputent
le pouvoir. Le défi posé aux militants consiste donc à trouver des relais et des soutiens fiables
au sein d’un univers où la superficialité programmatique le dispute généralement à l’opacité
des processus de décision. En évitant le dévoiement et l’instrumentalisation des dynamiques
sociales qu’ils représentent.

Départissons-nous d’une certaine idéalisation du populaire : les politiques ne sont pas
toujours les seuls à considérer les bases organisées comme une masse de manœuvre
électorale. Les exemples de leaders ou d’organisations toute entière qui succombent aux
logiques clientélistes et aux marchandages propres à la sphère politique ne sont pas rares. A
l’instar de cette élite de la société civile congolaise qui profita de sa participation au dialogue
intercongolais pour s’approprier des postes confortables au sein des institutions publiques.
Ces tendances sont d’autant plus fortes dans les régions où les « entrepreneurs politiques »
considèrent la capitalisation du mécontentement populaire comme une « accumulation
politique primitive », une première étape indispensable en vue de se construire le capital
social qui leur donnera accès au jeu politique.

Dans les pays où ils existent, les partis de gauche sont les alliés politiques « naturels »
des mouvements sociaux, dont ils partagent, du moins verbalement, les idées et les
revendications. Certains d’entre eux, comme le Partido dos trabalhadores (Parti des
travailleurs) du Brésil, sont historiquement la résultante, le « prolongement politique », de larges mouvements populaires. Les stratégies empruntées par ces convergences varient d’une
situation nationale à l’autre, et sont généralement conditionnées par les chances d’accès au
pouvoir des partis. Elles vont de la dynamisation des luttes et de la déstabilisation des
institutions – cas du MAS bolivien – aux efforts de canalisation de l’énergie sociale en vue de
maintenir la gouvernabilité du pays – fonction, selon Raoul Zibechi, des référendums de 2003
(contre la privatisation de la compagnie pétrolière d’Etat) et de 2004 (contre la privatisation
de l’eau) organisés par les syndicats et le Frente Amplio en Uruguay.

Les ambiguïtés des rapports entre gauche sociale et politique s’accentuent
inévitablement avec l’arrivée au pouvoir des gouvernements de gauche, comme l’illustre
l’actualité politique latino-américaine. L’écart, plus ou moins grand mais toujours présent,
entre le projet « historique » des gauches et les politiques menées par les gouvernements
entraîne immanquablement une intensification et une multiplication des tensions entre les
différentes composantes, sociales et politiques, de la gauche. [11]

Ces tensions vont parfois jusqu’au déchirement et à la formation de nouveaux pôles
militants, qui vont s’efforcer de mobiliser les groupes affectés ou déçus par la realpolitik des
gouvernements de centre-gauche – pensons à la formation de la nouvelle centrale syndicale
Conlutas au Brésil, en rupture avec le Parti des travailleurs et la Centrale unique des
travailleurs suite à la réforme des pensions du gouvernement Lula, à l’« Autre campagne »
menée au Mexique par le leader zapatiste Marcos à gauche du PRD de Manuel Lopez
Obrador, ou à la myriade de nouveaux mouvements sociaux « anti-ANC » suite aux politiques
de privatisation du grand parti sud-africain.

L’accent mis depuis quelques années par les bailleurs de fonds sur la participation de
la société civile à l’élaboration des stratégies de développement et de lutte contre la pauvreté
esquisse-t-elle l’avènement d’une plus grande prise en compte par les décideurs des
problèmes soulevés par les mouvements de victimes du développement ? Peut-être, mais les
potentialités de ces dispositifs participatifs dépendent largement du degré d’organisation de la
société civile et de la volonté politique des gouvernants.
L’examen des expériences africaines démontre que les nouveaux espaces de
« consultation » ou de « concertation » sont avant tout ouverts aux organisations qui ont de la
visibilité, des moyens financiers et qui partagent le langage et la vision de la coopération
internationale. Elles ont pour effet de marginaliser les acteurs sociaux les plus critiques des
politiques dominantes et de façonner artificiellement une société civile obéissante, qui tire sa
légitimité de son rôle d’interface entre la population et les bailleurs de fonds, tout en donnant
elle-même un surplus de légitimité aux gouvernants et aux experts en développement.

Portée des résistances

L’impact de l’émergence et de la multiplication des mouvements sociaux opposés aux
politiques néolibérales est bien entendu très variable d’un pays ou d’une région à l’autre,
suivant l’intensité des mobilisations, le contexte politique, la marge de manœuvre des
gouvernements et… l’appréciation des observateurs.

Difficile de ne pas évoquer tout d’abord l’évolution du scénario sociopolitique en
Amérique latine, où la « vague rose » des gouvernements de gauche ou de centre-gauche -
Venezuela, Argentine, Brésil, Uruguay, Bolivie, Chili… - et la mise au placard du projet de
Zone de libre-échange des Amériques (ALCA) sont le résultat direct de l’amplitude et de la persévérance des mobilisations sociales. En termes de changement de politique économique et
sociale, le bilan des gouvernements de gauche latino est cependant contrasté. [12] Il y a
effectivement de la marge entre d’un côté le gouvernement d’Evo Morales (Bolivie), engagé
dans une dynamique de transformation approfondie des structures institutionnelles,
économiques et sociales en faveur des pauvres, des indigènes et pour une plus grande
souveraineté, notamment dans le domaine des ressources naturelles, et de l’autre celui de
Lula, qui s’efforce d’étendre les programmes sociaux à destination des plus pauvres sans
s’écarter de l’orthodoxie économique de ses prédécesseurs. [13]

L’importance des développements en Amérique latine ne doit cependant pas nous
amener à minimiser l’action des mouvements sociaux dans les autres régions du Sud. Dans
des contextes politiques généralement adverses, leur première contribution est de sortir de
l’ombre et de mettre à l’avant de la scène publique les groupes sociaux qui paient le prix fort
de l’insertion de l’économie nationale dans le marché mondial. Leur présence et leur
dynamisme obligent les responsables à rendre des comptes quant à leurs choix de politique
économique, à prendre en considération leurs conséquences sociales sur les différents groupes
de la population et à défendre plus fermement les intérêts de ces dernières au sein des
enceintes internationales. Pensons par exemple à l’attitude plus combative des dirigeants
d’Afrique de l’Ouest au sein de l’OMC sur le dossier du coton, largement due aux pressions
des organisations nationales de producteurs sur leur gouvernement et à la campagne
internationale orchestrée par le Réseau des organisations paysannes et des producteurs
agricoles de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) avec le soutien d’ONG européennes.

Sans aucun doute, les résistances populaires ont singulièrement compliqué la mise en
oeuvre des réformes antisociales prônées par les institutions financières. Au grand dam de
leurs concepteurs, nombre d’entre elles ont été freinées, retardées, dénaturées, voire tout
simplement retirées, suite à l’intensité des mobilisations qu’elles ont suscitées. De
nombreuses victoires locales ont été enregistrées contre les projets d’exploitation des
ressources naturelles par les groupes transnationaux ou contre les grands projets
d’infrastructure irrespectueux des populations locales. A l’échelle nationale, des campagnes
amplement relayées ont permis de faire triompher les droits des gens sur ceux des affaires. La
campagne du TAC (Treatment action campaign) en Afrique du Sud pour la généralisation de
l’accès aux médicaments anti-rétroviraux génériques - contre la politique de brevet des
multinationales pharmaceutiques puis contre l’inertie du gouvernement sud-africain - est
emblématique de ces actions collectives efficaces et intelligemment orchestrées.

Si ces victoires politiques ou juridiques sont encourageantes, leur traduction dans les
faits reste généralement fragile et continue souvent à dépendre de l’évolution des rapports de
force à l’intérieur des pays et entre ceux-ci. Le même Vinod Raina qui, il y a deux ans
seulement, saluait l’adoption par la coalition indienne « United Progressive Alliance » de
centre-gauche d’une série de lois revendiquées par les mouvements sociaux, comme la loi sur
la garantie de l’emploi rural, constate aujourd’hui avec amertume qu’elles ont été vidées de leur substance par les courants néolibéraux qui dominent la coalition. Dans des contextes où
la représentativité des institutions reste problématique, l’inscription durable des conquêtes
sociales et démocratiques dans les politiques dépend donc de la capacité des mouvements
sociaux à maintenir un degré de mobilisation minimal sur une longue durée.


Bibliographie

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piqueteras
, Buenos Aires, Editorial Biblos.


Alternatives Sud (CETRI), vol. XIII, n° 4, 2006, « État des résistances dans le Sud - 2007 »

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[1Si la démocratisation est sans cesse ajournée par les autorités des pays arabes, notons avec Sarah Ben Nefissa
(voir sa contribution dans ces pages) que la réactivation des sociétés civiles de la région « est d’abord basée sur
un consensus général de la part de l’ensemble des activistes et organisations civiles autour de la « priorité
démocratique » et de la nécessité d’une réforme politique en profondeur de l’ensemble des régimes ».

[2En 1990, dans son discours de la Beaule, François Mitterrand annonce que dorénavant « ...la France liera tout
son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté ».

[3Paradoxalement, l’ajustement structurel et la libéralisation financière ont parfois contribué, dans leurs effets
sociaux désastreux, à précipiter la chute de dictateurs. Comme en Indonésie en 1998, où Suharto, après 30 ans
d’un règne sans partage, sera emporté par la crise sociale et politique provoquée par la crise financière qui touche
son pays.

[4« Presque total », car comme Zekeria Ould Ahmed Salem l’a montré concernant la Mauritanie, et
contrairement aux visions linéaires des experts de la transitologie spéculant sur l’échec ou le succès des
processus de transition démocratique, l’implantation de la problématique démocratique reconfigure toujours les
rapports politiques et ouvre aux acteurs sociaux des espaces de négociation inédits avec les dirigeants (1999,
132).

[5A l’instar de beaucoup d’africanistes, Gauthier de Villers insiste sur la grande aptitude des pouvoirs locaux à
interpréter et détourner les mesures qui leur sont imposées de l’extérieur : « Les pouvoirs africains, en crise
comme ils le sont alors, n’ont pas d’autre choix que d’accepter les programmes de l’ajustement structurel et ils
n’ont ni le pouvoir, ni les capacités, ni les motivations qui les conduiraient à infléchir, en les adaptant aux
réalités de leur pays, des politiques que la Banque mondiale et le FMI ont tendance à concevoir selon un moule
universel. Mais, étant chargés de leur exécution, ils ont les moyens de déformer la logique de l’ajustement en
faisant en sorte que les mesures d’assainissement n’épargnent personne sauf… eux-mêmes ». (De Villers, 2003,
43)

[6D’une part donc, il faut que l’action des administrations des pays en développement soit dictée par les normes
de la bonne gouvernance : elle doit gagner en efficience, en adoptant les méthodes du secteur privé, être plus
transparente et plus responsable, en s’ouvrant à la participation de la société civile et garantir aux investisseurs
privés un climat juridique, social et politique stable et rassurant. D’autre part, les gouvernements doivent mettre
en place des programmes sociaux ciblés et temporaires pour soulager les catégories les plus touchées par
l’ajustement économique.

[7Comme l’indique Vinod Raina dans sa contribution sur l’Inde, le Ministère indien de l’alimentation et de
l’agriculture a annoncé en juillet 2006 que 100428 paysans s’étaient donnés la mort depuis les débuts de la
libéralisation en 1993.

[8Dans beaucoup de pays, le rapport à l’Etat ne se vit pas sur le mode des droits ou de l’égalité devant la loi mais
suit une logique clientéliste et patrimoniale : il faut faire en sorte que son réseau, son clan ou sa famille ait un
accès privilégié aux ressources de l’Etat.

[9Plusieurs observateurs notent cependant que cette vocation militante est de plus en plus délaissée : une grande
partie de la génération qui a assuré le leadership des mouvements démocratiques dans les années 1980 et 1990 a
intégré l’appareil d’Etat (à travers l’ANC en Afrique du Sud ou le PT au Brésil par exemple), tandis que les plus
jeunes résistent difficilement aux avantages – bureau climatisé et salaire du premier monde – qu’offre une
carrière au sein des ONG ou des organisations de la coopération internationale.

[10Ces réflexes nationalistes sont particulièrement sensibles dans un pays comme la Turquie (voir contribution
de Gülçin Erdi Lelandais), mais ils se manifestent également dans des pays où on les attend moins, en témoigne
le récent litige entre l’Argentine et l’Uruguay autour de la construction de deux papeteries industrielles sur les
rives du fleuve qui sépare les deux pays, à l’occasion duquel des fractions importantes des sociétés civiles
argentine et uruguayenne se sont laissées gagner par la rhétorique nationaliste de leur gouvernements respectifs
(voir contribution de Maristella Svampa).

[11Ce phénomène n’est pas seulement à l’œuvre dans les pays dont les gouvernements ont franchement opté pour
une ligne modérée, comme le Brésil ou l’Uruguay. En Bolivie, le Movimiento Al Socialismo d’Evo Morales,
considéré par la masse des militants paysans et indigènes comme un « instrument politique » plutôt qu’un parti, a
dû affronter une opposition sociale de gauche (composée d’associations de quartier et de syndicats radicaux) dès
sa montée au pouvoir.

[12Sur les différences entre les scénarios latino-américains de gauche, voir Alternatives Sud « Mouvements et
pouvoirs de gauche en Amérique latine », Vol. XII, 2005, 2.

[13Comme les militants brésiliens, en particulier, en ont fait l’amère expérience : « occuper le gouvernement ne
revient pas à détenir le pouvoir ». Mais l’existence ou non de marges de manœuvres politiques - au sein des
parlements nationaux et des gouvernements locaux - et économiques - le degré d’endettement du pays et sa
dépendance vis-à-vis des marchés internationaux –, si elles ont leur importance, n’expliquent pas à elles seules
les stratégies adoptées par les gouvernements progressistes. Certaines des décisions prises, ou non prises, par les
exécutifs s’expliquent également par le fait que la course au pouvoir, puis la volonté de s’y maintenir, modifient
en profondeur la dynamique interne de ces partis (les calculs politiques et les concessions de toute sortes prenant
parfois le pas sur la volonté de transformation). Et les liens historiques avec les mouvements populaires se
distendent à mesure que leur base électorale et l’arc de leurs alliances s’élargissent.

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