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DIAL

L’actualité en bref - février 2005

Nicolas Pinet

mardi 1er mars 2005, par Dial, Nicolas Pinet

AMÉRIQUE LATINE

Une vague de pluies intenses s’est abattue sur le Venezuela, la Colombie et la Guyana durant la deuxième semaine de février. Les précipitations, d’une abondance inaccoutumée - Caracas, la capitale vénézuélienne a reçu le 8 février 84,7 millimètres de pluie, dépassant largement le dernier record datant de février 1951 (72,9 mm) - ont provoqué de nombreuses destructions, laissé au moins 100 000 familles sans logement et fait plus de 80 morts et une centaine de disparus.

ARGENTINE

Une mutinerie a éclaté jeudi 10 février dans une prison de Córdoba, après la restriction des horaires des visites, selon certaines sources, après qu’un gardien a maltraité la femme d’un des détenus, selon d’autres. Les affrontements ont provoqué 8 morts et des dizaines de blessés. Les négociations menées avec la médiation d’un prêtre et de quelques magistrats ont progressivement débloqué la situation, les détenus libérant les dizaines d’otages qu’ils détenaient après que l’administration pénitentiaire s’est engagée à maintenir les horaires des visites, à ne pas faire entrer les forces spéciales anti-mutinerie et à autoriser la présence des autorités judiciaires et de la presse lors de la reddition. La surpopulation pénitentiaire et les mauvaises conditions de détention font que des mutineries pourraient facilement éclater dans d’autres prisons.

L’envoi de 2 valises pleines de cocaïne (60 kg) de l’aéroport de Buenos Aires (Ezeiza) à celui de Madrid avait été découvert le 16 septembre 2004 par la police espagnole - personne n’était venu récupérer les bagages. L’affaire révélée par le journal argentin conservateur, La Nación, à la mi-février, et connue depuis déjà quelques semaines par le gouvernement, a entraîné la mise en cause et l’arrestation de membres du personnel de la compagnie aérienne Southern Winds. L’aviation militaire, chargée de la surveillance de tous les aéroports argentins depuis 1977, par l’intermédiaire d’un corps d’armée spécial, la Police aéronautique nationale (PAN), a aussi été mise en cause. Le responsable de l’aéroport international d’Ezeiza, Alberto Beltrame, dont le fils, Walter Beltrame, employé de Southern Winds, a été en fuite pendant 2 mois, avant de se livrer à la justice jeudi 17 février, a été relevé de ses fonctions par le général en chef de l’aviation, Carlos Rohde, vendredi 11 février seulement. Ce dernier a lui-même été destitué par le président Néstor Kirchner vendredi 18 février. Il lui est reproché de ne pas avoir informé ses supérieurs (dont le ministre de la défense) du délit, sur lequel la justice enquête depuis octobre, et d’avoir maintenu Alberto Bentrame à son poste jusqu’au 11 février.

Le processus de renégociation de la dette publique avec les créanciers privés s’est échelonné du vendredi 14 janvier au vendredi 25 février. Selon les estimations disponibles, l’opération semble avoir été couronné d’un certain succès, particulièrement marqué chez les créanciers argentins : environ 80% des tenants de bons auraient accepté de changer leurs titres déclarés en cessation de paiement contre de nouveaux titres, en pesos actuels. Quoi qu’il en soit, la charge de la dette reste considérable.

BRÉSIL

Les présidents brésilien, Luiz Inácio Lula da Silva, et vénézuélien, Hugo Chávez ont conclu, lundi 14 février, une « alliance stratégique » comprenant 26 engagements de coopération et de commerce dans les secteurs du pétrole, de la pétrochimie, de l’agriculture, des produits miniers, du transport, de la technologie et de l’aviation militaire. L’alliance a été conclue lors du passage du président brésilien à Caracas, qui partait ensuite pour la Guyana, pour signer d’autres accords d’infrastructure et de commerce, et le Surinam où il devait participer à un sommet des pays anglophones des Caraïbes. Une commission binationale, déjà mise en place par les présidents brésilien, Fernando Henrique Cardoso (1995-2003), et vénézuélien, Rafael Caldera (1994-1999), sera chargée de veiller au déploiement et à la bonne marche des accords.

Mardi 15 février, le député conservateur Severino Cavalcanti, issu du Parti Progressiste (PP) a finalement été élu président de la chambre basse pour les deux années à venir, après 13 heures d’assemblée, par 300 voix en sa faveur, contre 195 pour le candidat du Parti des travailleurs (PT), Luiz Eduardo Greenhalgh. Les dissidents du PT se sont alliés à l’opposition pour exprimer leur mécontentement. C’est la première fois que le parti disposant du plus grand nombre de sièges (le PT compte 91 députés) ne présidera pas la chambre basse. Le PT, le parti du président Lula pour qui cela représente un grave revers, ne siègera même pas au sein du groupe directif.

Vendredi 25 février, le leader du groupe parlementaire du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB - dans l’opposition), Alberto Goldman, a déposé plainte contre le président Lula pour « délit de responsabilité » et demandé l’ouverture d’une procédure de jugement politique. Ce même jour, le leader du groupe du PSDB du Sénat, Arthur Virgilio, a demandé le vote d’une motion de censure contre le président, qui pourrait servir de base, si elle était approuvée, au processus de destitution du président. Le PDSB cherche à tirer avantage de déclarations du président, faites le jour précédent et dans lesquelles il admettait avoir eu connaissance d’un cas de corruption du gouvernement antérieur et avoir enjoint au silence le haut fonctionnaire qui le lui avait révélé. S’appuyant sur la constitution, qui établit un « crime de responsabilité », l’opposition l’accuse d’avoir occulté un cas de corruption et d’avoir incité le haut fonctionnaire à faire de même.

Dorothy Stang, religieuse états-unienne naturalisée brésilienne et vivant depuis 40 ans dans l’Etat de Pará, au nord du Brésil et dans l’ouest de l’Amazonie, a été assassinée, samedi 12 février, par deux tueurs à gages. Agée de 73 ans, la religieuse qui vivait dans la commune de Anapú, au centre de l’Etat de Pará, était liée à la Commission pastorale de la terre (CPT) depuis sa création en 1975. Elle avait commencé à recevoir des menaces de mort en 1999 de la part des patrons d’haciendas qui s’approprient, le plus souvent illégalement, les terres qui appartiennent dans leur majorité à l’Etat, pour en exploiter le bois. Les menaces s’étaient intensifiées du fait de sa participation au Projet de développement durable, constitué de zones où 600 familles cherchent à développer l’extraction de produits forestiers et l’agriculture sans déforestation massive. Les conflits qui opposent les paysans pauvres, ayant souvent reçu un lopin de terre dans le cadre de la réforme agraire et les grileiros qui envahissent et s’approprient les terres par le biais de faux titres de propriété ou par la violence, ont aussi provoqué l’assassinat de 3 autres personnes dans la semaine qui a suivi. Les initiatives du gouvernement pour réagir contre ces crimes pourraient amener des changements. 2 000 soldats ont été envoyés dans la zone, un Cabinet de gestion intégré du gouvernement national a été installé dans l’Etat de Pará, et des décrets présidentiels du jeudi 17 constituent 13,4 millions d’hectares de forêts en zones protégées. Le gouvernement a aussi décidé de hâter l’envoi au Congrès législatif d’un projet de loi sur la gestion des forêts publiques qui réglementerait l’exploitation des ressources forestières sur les terres de l’Etat par le biais de concessions à des entreprises ou des communautés locales.

BOLIVIE

Vendredi 20 février, le président Carlos Mesa annonçait la promulgation d’une nouvelle Constitution. Celle-ci met fin au monopole des partis, seuls autorisés jusqu’à présent à présenter des candidats et permettra aux groupes de la société civile et aux peuples originaires de présenter eux aussi des candidats. En décembre auront lieu les élections municipales.

CHILI

L’avocat Eduardo Contreras a introduit une action en justice afin de suspendre l’immunité parlementaire du sénateur de droite, Sergio Fernández. Il l’accuse d’avoir été complice ou d’avoir couvert le Plan Condor, opération de répression coordonnée par les différentes dictatures du Cône Sud dans les années 70 et 80. Le sénateur a été ministre de l’intérieur de 1978 à 1982 et de 1987 à 1988. La procédure vient s’ajouter aux dossiers déjà en cours concernant deux généraux à la retraite, qui furent aussi ministres de l’intérieur durant la dictature (1973-1990) et sont accusés de complicité pour 20 enlèvements qualifiés dans le cadre de l’opération Colombo, montée pour masquer l’assassinat de 119 membres du Mouvement de gauche révolutionnaire (MIR).

La banque Riggs, où le Washington Post avait révélé le 15 juillet 2004 l’existence de comptes bancaires secrets d’Augusto Pinochet, pour un montant de 10 à 14 millions de dollars, a passé un accord avec l’avocat espagnol Joan Garcés, dans le cadre de la procédure conduite en Espagne par le juge Garzón contre l’ancien dictateur. La banque s’est engagée à fournir toutes les informations qu’elle possède sur les comptes d’Augusto Pinochet. Elle donnera aussi 9 millions de dollars à la Fondation Président Salvador Allende, qui a son siège en Espagne, que celle-ci distribuera aux victimes de la dictature. Joan Garcés, qui est l’avocat chargé de l’instruction en Espagne dans l’affaire impliquant la banque Riggs et Pinochet, met fin en retour aux procédures pénales et civiles mettant en cause les propriétaires de l’institution et les fonctionnaires figurant comme co-signataires ou co-titulaires sur les comptes de l’ex-général. Cette suspension des procédures a été confirmée par le juge Garzón, vendredi 25 février.

COLOMBIE

Une Réunion de coordination et de coopération internationale pour la Colombie s’est tenue à Cartagena de Indias au nord de la Colombie, début février. Ce groupe informel qui se réunit périodiquement - la dernière rencontre avait eu lieu à Londres en juillet 2003 - pour mettre en place une politique d’assistance à la Colombie, déchirée par un conflit interne depuis 40 ans, est constitué de 20 pays européens, du Canada - l’actuel président du groupe -, des Etats-Unis et du Japon, de l’Argentine, du Brésil, du Chili et du Mexique, de la Commission européenne, des agences de l’ONU et d’organismes financiers internationaux (Fonds monétaire international, Banque mondiale, Banque interaméricaine de développement et Corporation andine d’incitation). Le groupe des 24 (G-24), dans sa « Déclaration de Cartagena », émise jeudi 3 février, réaffirme les principes de la « Déclaration de Londres », qui avait lié l’aide internationale au respect des recommandations humanitaires de l’ONU. Dans le contexte actuel de démobilisation des groupes paramilitaires de droite (Autodéfenses unies de Colombie), l’octroi d’une aide a été lié à l’approbation d’une législation qui permette de faire respecter les principes de vérité, justice et réparation, à l’inverse de la procédure actuelle de démobilisation.
Le président colombien Alvaro Uribe a rendu visite à son homologue vénézuelien, Hugo Chávez, mardi 15 février. Prévue pour début février mais reportée du fait d’une maladie du président colombien, la visite vient clore l’épisode de tension entre les deux pays (voir l’actualité en bref de janvier 2005) provoqué par l’arrestation au Venezuela, par des hommes aux ordres de la Colombie, d’un guérillero des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

CUBA

Lundi 31 janvier, les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne (UE) ont décidé de mettre fin au gel des relations avec Cuba, mis en place en 2003 après la condamnation de 75 dissidents à des peines de prison allant de 6 à 28 ans de prison. La décision a été prise après la libération de 14 des dissidents détenus.

HAÏTI

Plus de 200 civils sont morts à Haïti depuis le 30 septembre 2004, date d’un premier affrontement à Puerto Principe entre les forces de police et des manifestants qui réclamaient le retour de l’ancien président, Jean Bertrand Aristide, éloigné du pouvoir le 29 février 2004. Depuis lors, des bandes armées partisanes d’Aristide réalisent des attaques fréquentes contre des commissariats, des commerces ou des automobilistes et sont durement réprimées par la police. Début février, un échange nourri de coups de feu dans un quartier de la capitale, Petion Ville, a provoqué la mort d’une enfant de 5 ans et blessé 3 civils.

MEXIQUE

La Cour suprême a décidé, mercredi 23 février, que l’ancien président Luis Echevarria (1970-1976) ne pourra pas être jugé pour l’assassinat, en juin 1971, de 42 étudiants tués par balles lors d’une manifestation d’opposition au gouvernement par un groupe des forces de sécurité de l’Etat, les Faucons. Elle considère en effet que les délits de génocide doivent être considérés imprescriptibles à partir de juin 2002 seulement, date de l’entrée en vigueur dans le pays de la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et de lèse-humanité, ratifiée en 2001. Les familles des victimes ont fait savoir qu’elles chercheraient d’autres recours légaux.

Dimanche 6 février, le Parti révolutionnaire démocratique (PRD) a remporté les élections au gouvernement des Etats de Guerrero, fief traditionnel du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), qui a gouverné le Mexique de 1929 à 2000, et de Basse Californie du sud. Dans l’autre Etat où étaient organisées des élections, Quintana Roo, au sud-est du Mexique, le PRI a conservé le gouvernement. A niveau national, la majorité des gouvernements des 31 Etats est détenue par le PRI, suivi du PAN (Parti action national, le parti de l’actuel président, Vicente Fox), et, en troisième position, du PRD, qui détient cependant la municipalité de Mexico.

PARAGUAY

La découverte du cadavre de Cecilia Cubas, fille de l’ancien président Raúl Cubas (1998-1999), âgée de 32 ans, qui avait été enlevée le 21 septembre 2004 à la périphérie d’Asunción, la capitale, a ravivé le débat sur la possible restauration de la peine de mort. Le président Nicanor Duarte a aussi décidé de changer de ministre de l’intérieur et de licencier 32 commandants de la police, mesure attendue après des accusations de fuites d’informations et d’irrégularités pendant l’enquête sur l’enlèvement.

URUGUAY

Le nouveau président uruguayen, Tabaré Vázquez, élu le 31 octobre 2004, a pris ses fonctions mardi 1er mars. Il pourra compter sur une chambre des députés et un sénat à majorité absolue de gauche, pour la 1ère fois dans l’histoire du pays. Le Sénat, composé de 30 membres, qui recommençait à siéger mardi 15 février, a élu à la présidence le chef du groupe parlementaire du parti comptant le plus de sièges, le Mouvement de libération nationale Tupamaros (MLN-T) : José Mujica, ancien guérillero qui a passé 15 ans en prison pendant la dictature militaire. La chambre des députés a élu à l’unanimité de ses 99 membres une autre membre du MLN-T, Nora Castro. Au début des années 60, les Tupamaros avaient choisi la voie de la lutte armée.

VENEZUELA

Alors que l’affrontement verbal avec les États-Unis ne tarit pas, l’armée vénézuelienne se modernise par une série d’achats de matériel étranger - fusils et hélicoptères russes, avions brésiliens, corvettes espagnoles et uniformes chinois.


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – L’actualité en bref.

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