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DIAL 2467

PARAGUAY - Les dangers du monolinguisme e contexte de mondialisation : le droit de parler sa propre langue

Bartomeu Melià

mardi 1er mai 2001, par Dial

Le problème des langues indigènes est à l’ordre du jour en Amérique latine. Face à une mondialisation qui se contenterait volontiers d’une seule langue, il est nécessaire de rappeler les bienfaits du bilinguisme. Article de Bartomeu Melià, à l’occasion du IVème Congrès international d’éducation interculturelle bilingue à Asunción, Paraguay, du 6 au 9 novembre 2000, paru dans Acción, décembre 2000.


Au XXIème siècle les défis de l’éducation seront sans doute étroitement liés aux problèmes de langage, voire confondus avec eux. La volonté de domination dans la communication des messages donne lieu à des attitudes agressives, à des exclusions et des discriminations. La globalisation, plus qu’une globalisation économique, se voudra une globalisation de systèmes de communication et de langages. Sans cette dernière, l’autre demeure toujours incertaine. Pour les partisans de la globalisation, la Babel des langues est toujours une malédiction. Les puissants veulent être les maîtres de la communication linguistique.

Ceux qui ont déjà été soumis à cette domination linguistique supportent généralement avec résignation et de façon pratiquement inconsciente les effets du premier processus de globalisation qu’ils ont connu sans même se souvenir de leur mémoire perdue. Certaines populations de l’Amérique espagnole, dès le début, acceptèrent un roi, une foi, une langue. Et le fait que des peuples n’y soient pas parvenus ou n’aient pas voulu la monarchie, le monothéisme ou le monolinguisme, et soient restés sans roi, sans foi, sans loi, a constitué un scandale.

L’expansion de l’atome

Aujourd’hui, les langues indigènes d’Amérique latine - à part celles des Caraïbes où le génocide a été rapide et irréversible - dans leur ensemble, sont parlées par un nombre plus grand de personnes qu’avant le début de la conquête espagnole, et ce, malgré les centaines de ces langues qui ont disparu. Elles entrent dans le XXIème siècle non seulement avec une volonté de résistance mais aussi d’expansion.

Pour ce faire, elles sont sur une voie qui va à l’encontre du système représenté par une tache envahissante semblable au pétrole déversé dans la mer, qui barbouille et paralyse tout ce qu’il touche.

Les peuples qui ne veulent pas subir de monopole ont compris qu’il ne sert à rien d’y répondre par un autre monopole, ni de répondre par un monolinguisme étroit et fermé sur lui-même à un monolinguisme globalisant. Ils répondent par un plan de multilinguisme lucide au monolinguisme stupide, car aucune langue ne peut nous être étrangère. C’est pour cette raison que la capacité à apprendre des langues de la part de ceux qui acceptent le multilinguisme est proverbiale.

C’est pour maintenir la force vive de cette identité que les peuples réclament le droit de parler leur propre langue, pour se sentir bien chez eux, tout en éprouvant le plaisir d’être ouverts à d’autres langues qui sont autant de paysages variés et colorés qui pénètrent par la fenêtre de nos oreilles et élargissent les horizons culturels. C’est ainsi que les mondes lointains parviennent à nos demeures.

Le programme de globalisation stupide, comme l’ont été toutes les conquêtes impérialistes, a peur qu’il n’y ait même qu’une seule voix qui ne répète pas les slogans éphémères à la mode et qui ait un accent particulier.

Le bon goût dans la langue

L’éducation est un processus traversé par la langue et les langages. Que faisons-nous tout au long de notre vie si ce n’est apprendre à nous dire nous-mêmes avec toujours davantage d’exactitude et de pertinence, plus de correction et de beauté, plus de plaisir pour nous-mêmes et pour nos voisins ?

En réalité une langue unique ne peut être qu’une petite prison, même si nous pouvons la parler avec des millions de personnes. C’est pourquoi l’éducation interculturelle bilingue n’est pas un remède pour ceux qui parlent des langues minoritaires mais, avant tout, une nécessité pour ceux qui pensent qu’ils possèdent déjà une langue globale qui en réalité n’existe pas.

 


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 2467.
 Traduction Dial.
 Source (espagnol) : Acción, décembre 2000.
 
En cas de reproduction, mentionner au moins l’auteur, la source française (Dial - http://www.dial-infos.org) et l’adresse internet de l’article.

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