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PANAMÁ - Le canal a des problèmes structurels et de niveau d’eau

Marco A. Gandásegui fils

samedi 1er février 2020, mis en ligne par Françoise Couëdel

Jeudi 23 janvier 2020 - L’Autorité du Canal de Panama (ACP) est dotée d’une équipe de diffusion et de relations publiques qu’envient les autres entités publiques du gouvernement panaméen. Tandis que les différentes officines qui ont la responsabilité gouvernementale dans le secteur du tourisme, par exemple, ne parviennent pas à se faire connaître, l’ACP est parvenue à créer une certaine angoisse avec sa campagne qui concerne l’eau.

Le monde, particulièrement le monde maritime, dont nous dépendons tous, se demande quand va être épuisée l’eau du bassin du Canal de Panama. Depuis de nombreuses années l’ACP alerte sur le fait que diminue le niveau de l’eau du lac de Gatún, sur lequel naviguent les bateaux qui franchissent l’Isthme et dont le déplacement atteint jusqu’à 150 mille tonnes. Si vous n’imaginez pas ce qu’implique ce chiffre, promenez-vous sur les rives du Canal et, de là ou depuis un des miradors, regardez ces bateaux qui passent sous le Pont des Amériques. Vous serez à la fois surpris et émerveillés.

Actuellement un peu plus de 14 000 navires par an transitent par le canal, soit une moyenne de 40 navires par jour. Les plus importants paient, en péage, plus d’un million de dollars pour le franchir. Il y a peu le Panama a construit un troisième jeu d’écluses pour que des navires dénommés post-Panamax puissent passer.

Quand l’augmentation de la capacité du Canal a été votée des études minutieuses concernant son bassin et sa production d’eau ont été réalisées. Les partisans de la construction de la troisième écluse ont présenté des études affirmant que l’approvisionnement en eau ne serait pas un obstacle pour le trafic des bateaux. Ils ont actuellement modifié leur position. À quoi attribuer ce changement ?

L’administration de l’ACP affirme que sa préoccupation concernant la disponibilité de l’eau pour le fonctionnement du Canal est due à plusieurs raisons. Les principales sont, d’une part, le changement du régime des pluies sur l’isthme de Panama ; de l’autre, la croissance de l’agglomération urbaine autour du Canal et les bassins qui l’alimentent en ce précieux liquide.

Le problème de fond du Canal de Panama est qu’il n’a pas été géré selon les règles que ses défenseurs ont présentées aux Panaméens pour les convaincre. D’une part, la richesse qu’il génère – en 2018 un total de 3,6 milliards de dollars – n’a pas été gérée de façon transparente. D’autre part, les membres du comité directeur ont fait de l’ACP un « parapluie » pour réaliser des affaires privées. En outre, le problème de l’eau est devenu une « patate chaude ».

Pour ce qui est du manque de transparence, il faut citer en premier lieu les accords des compagnies de navigation qui transitent par le Canal de Panama avec la Citibank de New York où elles déposent les redevances des péages. En outre, tous ou presque tous les membres du conseil d’administration ont des projets qui ne bénéficient nullement à l’ACP. Enfin, en ce qui concerne l’eau, l’ACP a proposé plusieurs solutions qui ne sont pas très convaincantes. Il y a quelques années l’ACP a annoncé qu’elle avait parmi ses projets celui de construire un barrage sur le fleuve Indio pour alimenter en eau le lac Gatún durant les mois de sécheresse (l’été). Cette initiative, de par ses implications politiques, est devenue un point d’une moindre importance. Une autre solution était de limiter la consommation d’eau de la population qui réside dans la ville de Panama qui se partage le précieux liquide du bassin du fleuve Chagres avec le Canal. Le projet qui a été envisagé récemment est de détourner l’eau du fleuve Bayano (sur lequel un barrage a été construit dans la décennie 1970) vers le lac Gatún.

En attendant, l’ACP révisera le régime des péages qu’elle appliquera aux bateaux (de plus de 125 pieds de long) qui transitent par le Canal. Tous les navires paieront un tarif supplémentaire fixe de 10 000 dollars pour chaque traversée et un tarif variable de un à 10 pour cent en fonction du niveau des eaux du lac Gatún au moment de leur passage. Si le niveau des eaux du lac est élevé le péage sera moindre et inversement.

En dépit de ces ajustements, le problème – à moyen ou à long terme – n’est toujours pas résolu. Il existe un problème structurel, celui de la corruption que génère la politique économique du pays (rentière et spéculative) et un problème technique relatif à l’approvisionnement en eau. Pour trouver la clé du succès du Canal au XXIe siècle il faut résoudre ces deux problèmes.


Marco A. Gandásegui fils, est professeur de sociologie à l’Université de Panamá et chercheur associé au Centre d’études latino-américaines Justo Arosemena (CELA). Blog : https://marcogandasegui19.blogspot.com/.

Traduction française : Françoise Couëdel

Source (espagnol) : https://www.alainet.org/es/articulo/204361.

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