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DIAL 3174

Ch’ulla et Yanantin, les deux matrices civilisationnelles de l’Orient et de l’Occident

Javier Medina

vendredi 9 décembre 2011, mis en ligne par Dial

Nous achevons avec deux textes du philosophe bolivien Javier Medina la série de textes présentant des perspectives critiques sur la notion de « développement » [1].

Ce texte consiste en une traduction d’extraits choisis du livre de Javier Medina intitulé Ch’ulla y Yanantin : las dos matrices de civilización que constituyen a Bolivia (La Paz, Garza Azul Impresores & Editores, 2008, 64 p.). Dans cet ouvrage, l’auteur propose une réflexion pour la refondation de la Bolivie, en intégrant ces deux matrices, occidentale et indienne, présente dans le pays. Cette réflexion s’inscrit dans le cadre des travaux de l’Assemblée Constituante, qui a fonctionné en Bolivie entre août 2006 et décembre 2007, et des travaux de laquelle est née la nouvelle Constitution bolivienne. [2]


1.- Unité et Parité

La voie la plus courte pour comprendre la différence entre l’Occident et l’Indianité est d’aller directement au software [3] qu’utilisent ces deux civilisations. Si l’on voulait simplifier encore plus les choses, je dirais que le mot Unité caractérise l’Occident et le mot Parité l’Indianité.

L’Occident et l’Indianité se différencient entre eux, parce que l’Occident parie sur l’Un : l’unité, l’homogène, l’impair, et l’Indianité sur le Pair : la parité, l’hétérogénéité. Du côté sémite : un seul Dieu, le monothéisme ; du côté grec, la monarchie, tout le pouvoir a l’Un. Du côté indien : le pair, la paire – Jaqi [4].

L’Unité, c’est l’impair, et se dit en quechua Ch’ulla. Parité se dit en quechua Yanantin, ce qui signifie deux énergies antagonistes et complémentaires. Pour l’Indianité, le monde vient par paires, par couples, ce qui est différent de la formule 1 + 1. Celle-ci nous amène seulement au dualisme, qui est la forme sous laquelle le monothéisme approfondit la séparation, donnant lieu au manichéisme : « l’empire du Bien lutte contre l’empire du Mal », et un seul doit l’emporter.

Ces deux manières antagonistes de traiter l’information se sont formalisées en deux systèmes logiques également antagonistes. Du côté occidental, dans les principes d’identité, de non contradiction et de tiers exclu. Du côté amérindien, dans les principes d’antagonisme, de complémentarité des opposés et de tiers inclus.

1.1.- Du côté occidental

Le principe d’identité

Ce principe s’écrit A est A. Cette formule exprime bien le refus de ce modèle à reconnaître l’existence de l’autre énergie, B, qui est en outre, est une énergie différente et antagonique. Cependant, A ne peut pas ignorer que l’Autre existe, mais il se fait l’illusion que cet Autre est identique à lui-même, A, car il ne peut y avoir qu’Un, et cet Un, bien sûr, c’est lui-même et il est universel. […]

L’exemple emblématique de cette manière de penser est le monothéisme patriarcal de la tradition abrahamique. Il postule un Dieu masculin, en niant le féminin, B, l’autre énergie contradictoire. Cela, bien sûr, n’implique pas que les femmes aient disparu de la face de la Terre. Elles continuent à exister, mais dans l’ombre : elles n’existent pas symboliquement. La faiblesse de ce Principe est qu’il ne traduit pas la réalité empirique telle que tout le monde l’expérimente et sans laquelle la vie ne se reproduirait pas. […]

C’est là le principe logique des politiques coloniales d’évangélisation, d’extirpation des idolâtries, du progrès et de la coopération au développement. C’est-à-dire, la pulsion d’homogénéiser le monde selon le modèle occidental. L’actuelle pulsion pour imposer une Pensée unique provient de cette matrice logique. La mondialisation est la forme contemporaine de l’imposition à l’ensemble de la planète, politiquement et économiquement, du principe d’identité d’Aristote. […]

Le principe de non contradiction

Ce principe logique dit qu’A n’est pas non-A. C’est-à-dire, que A et B ne peuvent pas être vrais en même temps et selon le même point de vue. […] Dit autrement, si j’ai raison, alors tu as tort. Si l’Occident a raison, alors l’Indianité a tort. […]

Le principe du tiers exclu

Ce principe soutient qu’il n’existe pas un tiers terme, T – T comme Tiers inclus –, qui soit en même temps A et non-A. Ce principe découle du précédent : une proposition est soit fausse soit vraie. En conséquence, il n’existe pas de troisième possibilité, juste et fausse en même temps, ou ni juste ni fausse. […] Si j’ai raison, alors tu as tort. Une troisième possibilité (par exemple que toi et moi ayons raison en même temps, c’est-à-dire justement la contradiction, le paradoxe) est exclue. […]

C’est là le software logique du postulat de L’Unité, qui, en théologie est le monothéisme, en politique la monarchie – tout le pouvoir à l’Un –, en économie, l’échange, en sociologie, l’individualisme, en droit, la propriété privée, etc. Et qui, fondamentalement, part d’une compréhension statique de la réalité. […]

Ce qui produit et reproduit cette « congélation » du flux de la vie, c’est l’écriture : elle congèle la voix en atomes verbaux, les morphèmes, qui sont fixés sur un support : papyrus, papier… Le flux de la conversation, de l’oralité, est détenu en un instant qui devient éternel. Il n’y a pas de monothéisme sans écriture ; il n’y a pas de propriété privée sans écriture, il n’y a pas d’État sans loi écrite.

Ce sont là les principes logiques qui ont modelé l’âme de l’Occident, jusqu’à aujourd’hui. Une rationalité d’exclusion, fondée sur une logique binaire qui ne reconnaît seulement que deux valeurs logiques, et en choisit une contre l’autre. Dit en un mot : le monothéisme a besoin et reproduit un modèle de non-relationnalité, et donc d’uni-directionnalité : du sujet à l’objet. Ce qu’on appelle la Grâce dans la théologie catholique.

1.2.- Du côté de l’Indianité

Maintenant, les principes qui ont configuré la civilisation amérindienne et qui commencent à conformer la civilisation du XXIe siècle sont les suivants :

Le principe de relationnalité

Au contraire de l’Occident, l’Indianité se base sur le principe de relationnalité : au commencement était l’Ayni [5]. Ce principe affirme que tout est lié, relié, connecté avec tout. En conséquence, l’entité de base est la relation elle-même, et non pas les entités, les êtres, comme dans la métaphysique occidentale. […]

En Occident, le concret est un produit secondaire de l’abstrait, de l’universel, qui est premier. Dans les Andes, le concret est premier et est l’épiphanie de la réalité comprise comme un réseau. Pour cela, pour un Amérindien, un être totalement séparé et isolé, comme le Dieu monothéiste, est simplement inimaginable. Ce serait le degré maximum de l’abstraction, c’est-à-dire, un non-être. […]

Le principe de complémentarité

Ce principe affirme qu’aucun être, aucune action ou événement n’existe isolé, solitaire, pour lui-même. Au contraire, toute chose ou être coexiste avec son complémentaire ; ensemble, ils sont une complétude. Mais le principe de complémentarité n’est pas quelque chose d’objectif dans le sens newtonien et scolastique : « des êtres existants en soi et pour soi ». La pensée occidentale classique tend à identifier le particulier avec le complet : pars pro todo. La pensée amérindienne insiste sur la signification littérale : il s’agit d’une partie, nécessaire et complémentaire, qui s’intègre avec une autre partie en une entité complète, c’est-à-dire complétée.

Le principe de réciprocité

Le principe de réciprocité naît de la recherche d’un équilibre contradictoire entre les forces antagoniques d’homogénéisation et d’hétérogénéisation, d’inclusion et d’exclusion, d’alliance et d’hostilité, d’amour et de haine. […] A et B sont opposés, mais se complètent dans une relation contradictoire. […]

Dit de manière quantique, l’énergie-matière est continue et discontinue en même temps : l’énergie est émise et absorbée en petits morceaux, quanta, et sauts (Constante de Planck) ; un photon est simultanément onde (Thomas Young) et particule (Einstein). Ce principe, formulé par Niels Bohr, de la complémentarité onde-particule pour le monde subatomique, Louis de Broglie l’étend à l’univers entier. […]

Le principe du tiers inclus

Il existe une troisième possibilité au-delà de la relation contradictoire : la relation complémentaire, justement, qui est un état particulier de potentialités co-existantes symétriques et contradictoires en elles-mêmes (l’« état T » de Lupasco). Cet état correspond à une situation particulière dans laquelle deux polarités antagoniques d’un événement sont d’intensité égale et donnent naissance à une troisième possibilité, en soi-même contradictoire : le Tiers Inclus. […]

Toute l’opposition entre l’Occident et l’Indianité, entre le christianisme et l’animisme, est contenue dans ce fait. Pour l’Occident chrétien, la vérité est le lieu de la non contradiction ; pour l’Indianité animiste et pour le nouveau paradigme scientifique, la réalité (et a fortiori la vérité) est, justement, le lieu même du contradictoire.

2.- Application du modèle

[…]

À l’humain

Le modèle subatomique onde/particule régit également la reproduction de la vie au niveau de l’humain. La vie humaine ne peut se reproduire qu’à partir de la complémentarité homme/femme. De la même manière que chaque énergie contient, à l’intérieur d’elle-même, l’énergie contraire minimisée, chaque homme possède sa part féminine, que C. G. Jung nommait anima et chaque femme sa part masculine, appelée animus.

L’Humain, d’un point de vue quantique, est la complémentarité de ces deux énergies et non seulement l’une d’entre elles, comme a tendance à le penser le monothéisme patriarcal occidental : le masculin, l’énergie congelée dans l’atome masculin.

En français, nous avons un bon exemple pour illustrer ce que nous venons de dire. Nous avons le concept abstrait d’Homme, qui est l’effet de la complémentarité entre l’homme et la femme. Mais il résulte que, au cours du temps, le modèle patriarcal, fondé sur l’idée d’un Dieu homme, unique, a réduit le sens complexe et complémentaire d’Homme à homme. C’est-à-dire que l’idée de femme, qui est contenue dans celle d’Homme, disparaît, est minimisée, ou est devenue subalterne. […]

Le christianisme, et en particulier le catholicisme, essaye de sortir de cette unilatéralité qui consiste à ne faire valoir que l’énergie masculine, grâce au concept de la Trinité. De l’idée solitaire du Père, on avance à celle du Fils, mais on n’ose pas professer, même symboliquement, le concept de Mère, qui serait le concept suivant logique de la métaphore qui utilisée : père, fils… et apparaît le concept sui generis d’Esprit Saint, qui désincarne à nouveau : l’esprit, la pure inertie mentale qui remplace la mère, afin d’effacer toute trace de sexualité, de fertilité, que ses patriarches associent à l’idolâtrie.

Le concept d’Unité, depuis une perspective quantique, ne peut qu’être vu comme un concept impair, et partant, anormal, que les Kollas [6] appellent Ch’ulla, incomplet, insuffisant. Le préfixe Chu- fait référence à l’incomplet, au non-défini, et le suffixe -lla signifie presque, quasi, sur le point de.

Au contraire le modèle indien de Yanantin, de Jaqi, de Chachawarmi [7], le mythe guarani des jumeaux… rend mieux compte de la réalité. Cela est dû au fait que l’Indianité est un système qui pense en contigüité avec la biosphère, avec les lois de la nature. Le monothéisme occidental, au contraire, part de l’idée d’une séparation d’avec la biosphère et de l’autonomisation de la sphère de l’humain, considéré comme le summum de la création : là est l’origine de son anthropocentrisme.

Bien sûr, il est juste de rappeler que le fait que le monothéisme patriarcal n’inclut pas la femme dans son modèle symbolique n’a pas impliqué que les femmes disparaissent de la face de la terre. Cette inadéquation entre les mots est la réalité est justement la marque d’une idéologie, qui est une sorte de viol de la réalité, afin d’imposer un projet contre-nature au bénéfice d’un groupe dominant particulier.

Au social

Au niveau social, le modèle quantique s’exprime dans le fait que l’énergie fermionique [8] (la fonction particule) se manifeste dans l’individu, alors que l’énergie bosonique (la fonction onde), se manifeste dans le groupe, dans la communauté [9]. Comme nous l’avons déjà vu, de la même manière que chaque énergie contient, en son sein, son énergie contraire minimisée, ainsi chaque être humain se trouve être en tension entre ces deux énergies antagoniques : la pulsion vers l’individu, et la pulsion vers la communauté.

Ainsi, la société, d’un point de vue quantique, est la complémentarité de ces deux énergies, et non seulement l’une d’entre elles, comme tend à le penser l’Occident : l’individu, l’énergie concentrée en atomes sociaux.

Il est typique des diverses cultures de la civilisation occidentale, monothéiste et patriarcale, de mettre l’accent sur la dimension individuelle et d’avoir créé des institutions qui encouragent et cultivent l’individu autonome et autosuffisant. Depuis le sevrage, le berceau, la chambre propre, etc., la civilisation occidentale modèle et crée l’individu, solitaire et isolé, qui est l’unité de base de son système religieux et politique. […]

Au contraire, il est typique des différentes sociétés de la civilisation orientale, et concrètement de l’Indianité, de mettre l’accent sur la dimension communautaire, collective, et de créer ses institutions, ses coutumes, afin d’encourager et de reproduire l’ayllu [10], conçu comme beaucoup plus qu’une somme d’individus (ce qui serait le « collectif », le « corporatif », du modèle occidental), comme l’effet que produit, dans le Taypi de son territoire, le Tinku [11] de l’énergie Aran et de l’énergie Urin [12]. […]

Au politique

Au niveau du politique, le modèle quantique s’exprime dans le fait que l’énergie fermionique (la fonction particule) se manifeste dans le libéralisme – autour de l’atome social : l’individu –, alors que l’énergie bosonique – la fonction onde – se manifeste dans le communautarisme : le réseau. Comme nous l’avons déjà signalé, de la même façon que chaque énergie contient à l’intérieur d’elle-même l’autre énergie opposée minimisée, de la même façon tout être humain se trouve en tension entre ces deux énergies antagonistes : la pulsion libérale et la pulsion communautaire.

Ainsi, le politique réel et complet est dans la complémentarité de ces deux énergies, et non seulement dans l’une d’entre elles, comme tend à le penser le monothéisme patriarcal occidental : le libéralisme ou le socialisme : l’énergie congelée dans l’atome politique, l’individu.

À l’intérieur de la civilisation occidentale, l’antagonisme entre onde et particule s’exprime dans la polarité libéralisme/socialisme-communisme. Ce qu’ont de commun le libéralisme et le socialisme, c’est de se baser sur la notion d’individu, fondamentale pour la civilisation occidentale.

À l’intérieur de l’Indianité, l’antagonisme entre onde et particule s’exprime dans la polarité entre factionnalisme et communautarisme, où le factionnalisme individualiste est de toute manière subalterne à la notion de communauté – d’ayllu dans les Andes – qui se base sur l’idée du réseau […]. C’est là un système multidimensionnel, alors que le modèle libéral/socialiste est unidimensionnel, comme le disait Herbert Marcuse. Son support est organique, en contiguïté avec la nature, à la différence du support mécanique, qui s’établit avec le passage du temps : l’histoire, sans aucun lien avec l’espace, la biosphère, qui est une simple donnée supposée, sans aucune implication en rien.

À l’économique

Au niveau économique, le modèle quantique s’exprime dans le fait que l’énergie fermionique, la fonction particule, se manifeste dans l’échange : l’énergie figée dans la monnaie. L’énergie bosonique, la fonction onde, se manifeste dans la réciprocité [13] : l’énergie fluide de l’ayni, la minka [14], etc. Encore une fois, comme chaque énergie contient son énergie opposée minimisée, ainsi également l’économie se trouve en tension entre deux énergies antagonistes : la pulsion à l’échange – argent, marché, accumulation – et la pulsion communautaire : ayni, fête, foire.

L’économie « complète » est donc la complémentarité de ces deux énergies, et non seulement l’une d’entre elles, comme tend à le penser l’Occident : l’échange, l’énergie figée dans l’argent.

Par échange, on entend la dynamique économique qui part de l’intérêt propre, avec l’objectif de s’enrichir et la finalité d’accumuler, pour avec ces ressources pouvoir acheter sur le marché les biens et les services nécessaires au bonheur.

On entend par réciprocité la dynamique économique qui part de la nécessité de l’Autre, avec l’objectif de produire une relation affective et la finalité d’obtenir le prestige d’être un grand donateur qui obligera les donataires à réciproquer plus généreusement le don reçu, de façon à former une chaîne de dons et de contre-dons qui rende possible la vie en relation et en harmonie avec non seulement l’entourage social, mais également l’entourage rituel et cosmologique. […]

Dans d’autres travaux [15], Javier Medina, avec Dominique Temple, montre que l’économie des peuples indigènes n’est pas une sphère autonome. L’économie, la production, ne peuvent pas être séparées de la spiritualité, du social, etc. Il montre également que le but de ces économies n’est pas seulement la production et l’échange « juste », mais la mise en circulation de « produits » qui n’ont souvent pas de valeur d’usage. On produit des choses pour pouvoir les faire circuler, pour tisser des liens sociaux, pour créer de la réciprocité, pour créer du sens. Et cette réciprocité ne se noue pas uniquement à l’intérieur de la communauté humaine, mais elle la relie à la communauté de la nature et à la communauté des esprits (qui ne sont en réalité pas séparées de la communauté humaine). La chacra (le « champ » des agriculteurs andins) est beaucoup plus qu’un moyen de production. Elle est le lieu dans lequel se tisse les liens entre les membres de la communauté humaine, et entre les différentes communautés (humaine, naturelle et surnaturelle). La chacra est à la fois « atelier » (dimension productive non aliénée), « temple » (lieu de relation avec la transcendance), « place du village » (lieu de socialisation), « école » (lieu d’éducation), etc. [16]

Au civilisationnel

Au niveau de la civilisation, le modèle quantique s’exprime dans le fait que l’humanité également, composée de masse et d’énergie, s’actualise soit comme énergie fermionique – la fonction particule –, et on peut appeler cette moitié Occident – l’énergie congelée dans la masse –, soit comme énergie bosonique – la fonction onde –, et cette autre moitié nous l’appelons Orient, dont l’Indianité est un sous-système : c’est l’énergie fluide du Tao [17], du Qhapaq Nan, du Tha’qi de la Qamaña. Toujours de la même manière, comme chaque énergie contient en elle-même son énergie contraire minimisée, l’humanité occidentale contient en elle-même, minimisée, l’énergie bosonique de l’Indianité, et l’humanité indienne contient en son sein, minimisée, l’énergie fermionique de l’Occident.

Ainsi, la Civilisation est la complémentarité de ces deux énergies : Orient et Occident, et non seulement l’une d’entre elles, comme tend à le penser le monothéisme patriarcal occidental : l’Occident est la civilisation et le reste est la barbarie qui doit être civilisée par elle. De là dérive la Conquista, l’évangélisation, l’extirpation des idolâtries, l’aide au développement et la lutte contre la Pauvreté d’aujourd’hui.

Ainsi, d’un point de vue quantique, on entend par civilisation le résultat de comment l’humanité résout de manière hégémonique la polarité masse/énergie. Cette polarité archétypique se divise en autres polarités plus connues, par exemple créateur/créature, bien/mal, espace/temps, sujet/objet, vie/mort, etc.

Si cette polarité est pensée de manière excluante, c’est-à-dire de façon dualiste (« l’empire du Bien lutte contre l’empire du Mal », G. W. Bush), on obtient la civilisation monothéiste occidentale. Si cette polarité est pensée de manière incluante, c’est-à-dire comme une unité duale, « non-dualité », Advaita, Yanantín, on a alors la civilisation orientale, dans notre cas, la société amérindienne animiste. […]

C’est le grand parapluie de l’humain. À l’intérieur de chaque civilisation on trouve différentes cultures qui sont des variations dues en grande partie à des réponses apportées à différents écosystèmes dans lesquels les êtres humains doivent assurer leur vie et leur reproduction.

Ainsi, nous avons par exemple les cultures espagnole, suisse, hollandaise, danoise, anglaise, etc., qui sont très diverses et différentes entre elles, mais qui partagent un parapluie cosmologique unique et commun, caractérisé para la séparation, le monothéisme, l’individualisme et l’échange. De la même manière, nous avons les cultures tibétaine, chinoise, mapuche, aymara, quechua, guarani, maya, toltèque, iroquoise, inuit, etc., qui sont également différentes entre elles, mais qui partagent le même parapluie cosmologique, caractérisé par e fait de se savoir partie du continuum biosphérique, par l’animisme, le communautarisme et la réciprocité. […]

3.- L’Occident et l’Indianité

Cela dit, il faut ajouter que le principe de réciprocité est incompatible avec certaines notions transcendantales de la civilisation occidentale. L’Occident est une civilisation unidimensionnelle. Avec la physique quantique, elle commence à changer, à partir du monde universitaire. Mais cela n’empêche pas qu’elle comprenne les relations de manière unidirectionnelle. Dieu est un actus purus, souverain, omnipotent, omniscient ; Il n’a pas besoin de la créature. S’Il la crée, c’est comme fruit entièrement libre de sa condescendance, de sa liberté, de sa Grâce. Il n’attend pas de réponse humaine pour être. Traduit épistémologiquement, cela signifie que le sujet connaît de manière active un objet qui est compris comme passif. Économiquement, que l’Homme exploite, au travers du travail et de la technologie, la terre qui est comprise comme passive et inerte, pour la transformer en produit, c’est-à-dire, en richesse.

Le « dieu » amérindien, au contraire, advient au moment du rituel ; il a besoin de l’être humain pour se faire présent, et vice versa. Au-delà du rituel (le laboratoire), il existe virtuellement dans le cosmos, comme un photon avant d’être mesuré dans l’accélérateur de particules : c’est un dieu quantique. Économiquement, travailler, c’est élever, cultiver la vie. La réciprocité implique une compréhension interactive de la réalité. Dit autrement, la réciprocité est la recherche d’un équilibre contradictoire entre les forces d’inclusions et d’exclusion. […]

Je sais que, dans ce contraste, l’Occident ne paraît pas à son avantage, et que cela peut causer une certaine résistance à accepter cette manière de comprendre les relations entre christianisme et animisme amérindien. J’en suis désolé ; il nous arrive la même chose que les physiciens du premier quart du XXe siècle, lorsque l’expérimentation scientifique changeait la vision de la matière-énergie, de l’espace-temps, de la vie et de la mort. Il y eu également de fortes résistances. […]

Utilisant une métaphore quantique, je dirai que dans l’ère « écozoïque » qui commence, la « fonction onde » devra être jouée par la civilisation amérindienne et la « fonction particule » par la civilisation occidentale. Ensemble, dans un équilibre contradictoire, elles seront l’Unité duale vers laquelle marche l’humanité. En ce sens, l’Occident doit cultiver, en son sein, son Indianité réprimée, et l’Indianité doit cultiver, en son sein, l’Occident auquel elle résiste. Mais pour cela, nous devons tous commencer à régler nos comptes avec le colonialisme interne, tant les Boliviens occidentaux que les Boliviens amérindiens. […]

4.- En quoi consiste alors le dialogue entre civilisations ?

Le premier dialogue doit se donner à l’intérieur de chacun. Cela consiste à connecter notre côté masculin, dont les caractéristiques les plus stéréotypées indiquent qu’il est extroverti, conquérant, agressif, individualiste, avec notre côté féminin : plutôt penché vers l’intérieur, réceptif, conciliateur, communautaire… Une manière d’y parvenir est de connecter notre hémisphère neuronal droit : holiste, systémique, en réseau, quantitatif, avec l’hémisphère neuronal gauche : linéaire, sectoriel, séquentiel, qualitatif.

Ainsi, le premier échelon du dialogue des civilisations consiste à connecter notre polarité constitutive corps/esprit, qui a été séparé par les patrons culturels du monothéisme patriarcal, qui met l’accent sur l’esprit et rejette la matière. Si nous parvenons à atteindre cet équilibre intérieur, nous sommes prêts pour le second pas.

Le deuxième pas consiste à considérer avec des yeux nouveaux notre relation à l’Autre. En premier, accepter qu’il soit Autre, différent, antagonique et non identique à nous-mêmes. […] Il s’agit de comprendre que, si nous sommes différents, ce qui constitue l’Autre, cette altérité, nous la possédons également comme potentialité réprimée. C’est-à-dire, l’Autre est en nous, ce n’est pas une extériorité absolue. Tout Occidental a en lui un Indien réprimé, et tout Indien a en lui un Occidental auquel il résiste.

[…] « L’Indien », se sont les pulsions holistes, écologiques, systémiques, communautaires ; les valeurs qui sourdent de la réciprocité, de la recherche de l’équilibre : le qualitatif. « L’Occidental », se sont les pulsions linéaires, sectorielles, séquentielles, individualistes ; les valeurs qui sourdent de la liberté, du progrès, du développement : le quantitatif. Mais tous, Indiens et Occidentaux, nous possédons ces deux dimensions, c’est seulement que l’une domine l’autre.

Le pas suivant est de comprendre l’Autre comme notre complémentaire. C’est-à-dire que les Occidentaux doivent démonter l’idée qu’il n’existe qu’un seul modèle, qui est le nôtre et qui, en plus, est universel, et que, par conséquent, ce sont les Indiens qui doivent s’adapter à nous, c’est-à-dire, se civiliser. Les Indiens, de leur côté et pour des raisons logiques – tiers inclus – font déjà cet effort de nous comprendre comme leurs complémentaires. De ce fait, ils acceptent le Dieu monothéiste, l’argent, le marché, la modernité, et ce qui est Autre. Mais si l’acceptation de l’Autre n’advient que d’un côté, le modèle ne fonctionne pas parce que cela rend vulnérables les représentants de la complémentarité à l’unilatéralité du modèle occidental. C’est l’histoire de la colonisation. Le modèle ne fonctionne que si les deux polarités acceptent le modèle quantique que nous offre le nouveau paradigme. Il faut démonter le modèle newtonien obsolète de lois absolues et universelles. L’univers est plutôt relativiste, probabiliste, contextuel. C’est là la condition de possibilité d’un dialogue de civilisations [18]. […]

5.- Qu’est-ce alors que décoloniser ?

Pour commencer, décoloniser est quelque chose qui nous incombe à tous ; ce n’est pas seulement une tâche des colonisés, mais aussi des colonisateurs. Il est fondamental et nécessaire de le signaler, parce qu’il semblerait parfois que seuls les Indiens, les Africains, les Asiatiques, etc. devraient se décoloniser, mais pas les Occidentaux.

Deuxièmement, décoloniser signifie démonter le modèle monothéiste patriarcal, c’est-à-dire, la vision unilatérale et unidimensionnelle qui réprime ou ignore l’altérité orientale. Pour le dire de manière occidentale, il s’agit de démonter ou déconstruire le logocentrisme occidental et d’aller vers un modèle quantique boson/fermion, onde/particule.

La manière la plus sympathique, pour un Occidental, de démonter le logocentrisme patriarcal de son modèle exotérique, c’est de se remettre à boire aux sources de ses traditions mystiques. Dans le cas du judaïsme, de retourner à la Kabale ; dans le cas du christianisme, de retourner aux mystiques chrétiens ; dans le cas de l’Islam, de retourner au soufisme. Ces traditions mystiques de l’Occident partagent le même substrat que les traditions hermétiques de l’Orient. À ce que l’on appelle, simplement, la sagesse.

Décoloniser signifie donc appliquer le principe de complémentarité des opposés à tous les niveaux de la vie. Dit autrement : visibiliser ce qui a été réprimé, caché, nié, par la « conquête », c’est-à-dire par l’Inquisition, l’évangélisation, l’extirpation des idolâtries, le progrès et le développement (à travers par exemple la lutte contre la pauvreté et les Objectifs du millénaire). (Re)découvrir ce qui a été écrasé, oublié, dévalorisé. Ensuite, lorsque cela aura été fait, relativiser le paradigme occidental avec cette énergie retrouvée, opposée et complémentaire, afin de trouver un équilibre « complété » de ces deux polarités.

Afin de réfléchir de manière concrète à ce que peut signifier penser en termes d’Onde et de Particule, antagoniques mais complémentaires, voici quelques exemples :

Pour les territoires

La dimension Particule s’exprime dans la notion de limites, d’espaces homogènes et compacts. C’est-à-dire, tout ce que nous connaissons en Amérique latine depuis les Réductions tolédiennes. Généralement en Occident, ce sont les concepts liés aux États-Nations, aux frontières fixes et étanches, etc. La dimension Onde est celle qu’ont pratiqué et continuent de pratiquer les Indiens des Andes : une vision en réseau du contrôle d’un maximum d’étages écologiques. C’est-à-dire, des espaces hétérogènes, distants mais connectés – fluides. De ce point de vue, par exemple, la Bolivie est là où vivent des Boliviens : en plus de la Bolivie, la ceinture du grand Buenos Aires, les environs de Sao Paolo, de Washington ou de Barcelone… À l’ère de la globalisation, cette dimension connaîtra probablement une visibilité de plus en plus grande, ainsi qu’une pertinence politique et économique de plus en plus grande également, à travers les migrations Sud-Nord, les « remesas », etc. […]

Pour la terre

La dimension Particule s’exprime, par exemple, dans la « Nouvelle Loi sur les terres » que propose le MAS [19], et quand ce dernier parle de « valeur foncière », de « propriétaires terriens », de ce que « l’État est le propriétaire originaire de la terre », et même de concession […]. La dimension Onde, à l’inverse, est celle qui conçoit la Pachamama [20] comme un être vivant, comme un système auto-régulé et intelligent, dont les êtres humains font partie et ne sont pas maîtres et propriétaires. C’est la vision écologiste et animiste de l’Indianité. Décoloniser, dans ce contexte, signifierait positionner fermement cette vision systémique, holiste, animiste dans une nouvelle loi qui ne pourrait plus être nommée « Loi sur les terres » (cela correspond au paradigme caduque des réformes agraires de la première moitié du siècle passé) mais, comme disent les Indiens boliviens, de « territoire » ou, mieux encore, Urakpach, Yvi, etc. […]

Dans l’éducation

La dimension Particule s’exprime dans la prépondérance donnée à la connaissance fondée sur l’expérimentation scientifique et l’écriture. Un petit nombre définit ce qui est correct : la vérité. Les autres répètent de mémoire, apprennent à avoir foi en ce que disent les spécialistes et mémorisent comme des perroquets. La dimension Onde s’exprime elle dans la connaissance produite par l’expérience de vie propre et se transmet au travers d’un système rituel de génération en génération. On sait parce qu’on a vécu, pas parce qu’un autre nous l’a dit. Décoloniser l’éducation, c’est rechercher la complémentarité de ces deux systèmes de connaissances, non « l’égalité des chances » et moins encore pour accéder à un seul système. Il ne s’agit pas de prétendre à l’universalisation des savoirs et des connaissances indiens comme homologues des savoirs et des connaissances occidentales. De cette façon, ils ne deviendront jamais « universels » dans le sens occidental qui universalise seulement une partialité. L’universel pour de vrai est l’effet de la complémentarité de la connaissance par expérience vécue et par expérimentation scientifique : les deux choses. « L’égalité des chances », « l’école unique », « l’alphabétisation » sont des mesures libérales propres d’un modèle d’économie sociale de marché, d’un État unitaire de type occidental, fondé uniquement sur l’écriture. C’est bien, mais cela n’a rien de décolonisateur. Une politique éducative serait décolonisatrice si elle associait à l’antérieur le fait d’« apprendre à lire les rides du visage des grands-parents ». […]

En politique

La dimension Particule s’exprime dans la prépondérance accordée à l’individu, comme unité minimum de sens, ce qui donne lieu tant au libéralisme qu’au socialisme, dans la mesure où ce dernier comprend le collectif comme simple agglomération d’individus. La dimension Onde s’exprime quant à elle dans la prépondérance accordée à la communauté qui est l’effet quantique de la complémentarité d’Aran et Urin, deux énergies antagoniques qui constituent l’ayllu. […] Décoloniser signifierait ainsi positionner de manière forte l’énergie communautaire pour rétablir l’équilibre, et, ensuite, donner sa place – relative, et non absolue – à l’énergie fermionique individualiste. Pour cela, il n’y a rien de mieux que d’utiliser le modèle de l’ayllu que se fonde, justement, dans la complémentarité d’Aran et Urin, c’est-à-dire, des deux énergies.

Dans la religion

La dimension Particule s’exprime dans la prépondérance donnée à l’Un, au Ch’ulla, au Dieu du monothéisme abrahamique qui instaure un modèle de civilisation fondée sur la séparation et le privilège d’une seule polarité – Yahvé, le temps, l’histoire, l’individu –, et la répression de l’autre polarité – les wak’a, l’espace, l’animisme, le systémique. La dimension Onde s’exprime dans le Yanantin, la parité – la complémentarité des opposés de l’animisme indien. Décoloniser, en conséquence, c’est chercher la complémentarité des deux pôles : expliquer leurs relations et différences (et où mieux qu’à l’école ?), plus que postuler un État laïque, qui correspond à un modèle libéral d’État, reposant sur le présupposé qu’il n’existe qu’un seul modèle civilisationnel, l’occidental, et qui, du fait du principe de scission, de séparation, distingue le privé du public, le sacré du profane, considérant que l’État est en rapport avec le public et le monothéisme avec le privé. […]


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 3174.
 Traduction de Mathieu Glayre, revue et augmentée par Dial.
 Source (français) : blog Creciendo Juntos, 24 novembre 2010.
 Source (espagnol) : Javier Medina, Ch’ulla y Yanantin : las dos matrices de civilización que constituyen a Bolivia, La Paz, Garza Azul Impresores & Editores, 2008, 64 p.

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[2Ce paragraphe a été rédigé par Mathieu Glayre pour présenter sa traduction du texte de Javier Medina publié sur le blog Creciendo Juntos. Dial l’a repris en le modifiant légèrement.

[3En anglais dans le texte – NdT.

[4Jaqi : le couple humain. La femme et l’homme ne deviennent des personnes à part entière qu’en s’unissant comme couple. Le couple est l’unité minimum de sens social chez les Aymaras – NdT.

[5Forme du principe économique de la réciprocité qui consiste à échanger réciproquement des biens et des services égaux, pratiqué principalement entre parents consanguins et rituels – NdT.

[6Indiens des Andes, en particulier Quechua et Aymara des Andes Centrales. Le Kollasuyo – pays des Kollas – était la partie de l’Empire inca qui correspond au Sud du Pérou et à la Bolivie actuelle – NdT.

[7Union de deux énergies opposées et complémentaires archétypiques, mâle et femelle, pour le travail harmonieux dans l’unité de base de l’ayllu qu’est la famille – NdT.

[8Les particules se présentent sous deux classes de formes basiques : bosons et fermions. Les fermions sont les particules qui se combinent pour former la matière : électrons, protons et neutrons ; ils sont essentiellement antisociaux. Leurs fonctions ondes peuvent se superposer jusqu’à un certain point, mais jamais complètement. Ils demeurent jusqu’à un certain point des individualités. Par contre, les bosons – photons, particules négatives et positives w et la particule neutre z, glucons et gravitons – constituent des particules relationnelles. Les bosons transportent les forces qui maintiennent uni l’univers et sont essentiellement grégaires – NdT.

[9Le mot « comunidad » est plus riche en espagnol qu’en français, et en particulier en espagnol bolivien. Une « comunidad », c’est le village ou le hameau, mais c’est aussi son territoire, son organisation sociale, politique, familiale et productrice propre. Et s’il s’agit d’une « communidad » indienne, le terme inclut également les liens tissés entre les êtres humains entre eux et entre eux et leur « environnement » au sens large, c’est-à-dire la terre, le territoire, le vent, l’eau, les animaux, les plantes, les esprits, les dieux, etc. – NdT.

[10En apparence, pour un œil occidental, un ayllu est simplement un ensemble de villages ou de hameaux liés et apparentés. En réalité, il est beaucoup plus que cela, c’est la base des sociétés andines, puisqu’il intègre toute la « communauté vivante » (la communauté humaine, la communauté animale, la communauté « inanimée » (rivières, montagnes, plantes, etc.), la communauté « transcendantale » (ancêtres, divinités, etc.), mais également les relations sociales, familiales, productives, économiques, religieuses, etc. qui sont tissées entre ces différentes communautés, et entre les « individus » qui les composent – NdT.

[11Rencontre des contraires. Le mot signifie en même temps « frontière », qui sépare en même temps qu’elle unit les deux parties, et « combat rituel », par exemple entre deux ayllus, qui fonctionne comme un mécanisme d’ajustement, de redistribution, de rééquilibrage, d’ « équilibre » entre deux parties d’un tout, de « rencontre », par exemple la confluence de deux rivières – NdT.

[12Aran et Urin sont les deux énergies primordiales, qui divisent par exemple les hameaux, les communautés et les ayllus en deux moitiés opposées mais complémentaires, selon des dichotomie fondamentales, comme haut/bas, chaud/froid, etc. – NdT.

[13Voir les travaux de Dominique Temple sur l’économie de la réciprocité : http://dominique.temple.free.fr/ – NdT.

[14Dans l’économie de la réciprocité, forme de collaboration mutuelle par laquelle quelqu’un travaille pour une autre personne en échange de nourriture, produit ou argent.

[15Voir par exemple : Javier Medina, éd., Ñande reko : la comprensión guaraní de la vida buena, La Paz, FAM-Bolivia / Programa de apoyo a la gestión pública descentralizada y lucha contra la pobreza, componente Qamaña, « Gestión Pública Intercultural » n° 7, 2002, 135 p., disponible en espagnol : http://www.unicefninezindigena.org.ar/pdf/Legislacion/comprension_guarani.pdf – NdT.

[16Commentaire du traducteur.

[17Concept central de la philosophie chinoise. « Tao » signifie « voie », « chemin ». Le tao est la force fondamentale qui coule en toutes choses dans l’univers, qu’elles soient vivantes ou inertes. C’est l’essence même de la réalité, par nature ineffable et indescriptible – NdT.

[18Boaventura Do Santos propose de travailler à partir de ce qu’il appelle une herméneutique diatopique, afin de tenter de dépasser le débat entre universalisme et relativisme. Voir par exemple : « Vers une conception multiculturelle des droits de l’homme », Droits et Société, n° 35, 1997 – NdT.

[19Mouvement vers le socialisme, le parti actuellement au pouvoir – note DIAL.

[20La Terre-mère – note DIAL.

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