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ARGENTINE - Les manifestations de mécontentement contre Milei grandissent

Carlos Iaquinandi Castro

jeudi 28 décembre 2023, mis en ligne par Françoise Couëdel

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Les premières mesures du président Javier Milei ont provoqué des manifestations spontanées à Buenos Aires, Rosario, La Plata, Córdoba et dans d’autres villes d’Argentine. Des habitants de différents quartiers se sont rassemblés sur les places publiques en reprenant le « cacerolazo » classique où les manifestants accompagnent leurs revendications en frappant sur des casseroles et des instruments de cuisine avec des cuillères ou des baguettes.

Le décret intitulé « Décret de nécessité et d’urgence » contient une série de mesures de dérégulations. Il inclut la dérogation à la Loi des Loyers en vigueur, l’interdiction du droit de grève, la conversion en sociétés anonymes des entreprises d’État en vue de privatisation et d’importantes réformes régressives concernant la santé publique. Quant aux assurances privées sur la santé, elles pourront désormais fixer librement leurs tarifs. Des avocats, des constitutionnalistes dénoncent le fait que Milei s’est arrogé les pouvoirs législatifs du Congrès et estiment que ces mesures seront dénoncées devant la justice.

Le projet économique reprend le modèle de Pinochet au Chili et reproduit quasiment les mesures que la dictature a appliquées en son temps à partir du coup d’État de septembre 1973 et celle de Videla (Argentine, mars 1976).

Ce décret scandaleux de Milei en Argentine favorise les secteurs des entreprises et des consortiums économiques internationaux, il livre des secteurs clé de l’économie du pays et appauvrit et atteint gravement la majorité de la société. Ce sont des mesures similaires à celles de la dictature de Videla qui étaient annoncées par le quotidien Clarín de Buenos Aires dans son édition du 3 avril 1976.

Milei a été élu après une campagne électorale au cours de laquelle son slogan était « en finir avec la caste politique » pour harponner une société lasse des tromperies post-électorales. Il a compté sur l’appui de grands groupes économiques et financiers. Également sur ceux qui, en leur temps, ont soutenu la dictature militaire. Et ses mesures sont révélatrices.

Je ne me souviens pas qu’un président élu par un vote populaire en Argentine ait connu un rejet aussi massif quelques jours après sa prise de fonctions, à la seule annonce de ses premières décisions.

Son « fichu décret » comprend des mesures qui touchent directement les travailleurs. Il comprend des restrictions au droit de grève, établit la flexibilité de l’emploi et autorise des journées de travail jusqu’à 12 heures. Milei prévoit aussi des mesures exceptionnelles de répression policière contre les manifestations ou les rassemblements éventuels telles que l’identification des manifestants pour leur retirer des aides ou des subventions.

Cela comprend 300 mesures, entre autres l’interdiction que l’État intervienne pour contrôler les prix de l’alimentation, des biens de première nécessité, les loyers, la conversion en sociétés anonymes des entreprises d’État, dans le but de les privatiser, et d’importantes mesures régressives concernant la santé publique. Il indique que les assurances de santé privées pourront fixer librement leurs tarifs.

Le démantèlement de l’État argentin programmé par Milei pourra inclure aussi celui de la compagnie pétrolière historique Yacimientos Petrolíferos Fiscales (YPF), possibilité qui a déjà été amplement rejetée par ses techniciens et ses ouvriers. (Elle a déjà été vendue sous la présidence de Menem à Repsol et récupérée moyennant un coût élevé par le pays sous le gouvernement de Cristina Fernández).

Le chapitre des dérogations aux lois inclut celle qui fixait le contrôle de l’État sur les commerces et l’Observatoire de Contrôle des prix du Ministère de l’économie disparaît. Une autre norme que Milei prétend éliminer est la Ley de Tierras ( loi sur les terres) qui, pour la défense de la souveraineté nationale, limite l’achat de terres naturelles du pays par des étrangers.

Les autres mesures vont dans le même sens, pénalisant une majorité d’argentins et les experts estiment qu’elles sont dictées par le Fonds monétaire international. En résumé, ce sont non seulement les travailleurs et les secteurs aux ressources limitées qui seront les plus touchés, mais en définitif tout le pays.

Un législateur d’expérience a affirmé que Milei « a brandi le drapeau échec pour l’Argentine ». Et le gouverneur de la province de la Pampa, Sergio Ziliotto, a déclaré que « 40 ans après sa récupération la démocratie vit un de ses moments les plus durs et tristes de son histoire ».

Il est bon de rappeler la pensée d’Eva Perón : « La seule chose que nous devons faire est d’acquérir une pleine conscience du pouvoir que nous possédons et n’oublions pas que personne ne peut rien faire sans le peuple, que personne non plus ne peut rien faire que le peuple ne veuille pas. Il suffit que nous les peuples nous décidions d’être maître de notre propre destin ! Pour tout le reste il s’agit d’affronter le destin ». Son héritage historique est toujours d’actualité.


Traduction française de Françoise Couëdel.

Source : envoi par le SERPAL, Servicio Prensa Alternativa.

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