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CHILI - La nationalisation du cuivre remonte à 53 ans : une fierté plus grande que la bourse des entrepreneurs

Javier Arroyo Olea

mardi 23 juillet 2024, mis en ligne par Françoise Couëdel

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12 juillet 2024.

En plus d’une occasion le gouvernement actuel a évoqué l’héritage du gouvernement de l’Unité populaire pour souligner les acquis de son administration. Tentant d’apporter de l’eau à son moulin, l’administration du président Boric tente de tirer profit de la lutte historique des travailleurs et travailleuses pour la rattacher – ne serait-ce que symboliquement – à son programme politique. Mais pourquoi en parlons-nous ?

Il y a 53 ans le président Salvador Allende obtenait la nationalisation du cuivre. Ce fut un événement essentiel dans l’histoire récente du Chili et du monde, après une lutte acharnée menée par les ouvriers mineurs, hommes et femmes, qui a permis d’arracher le minerai des mains des capitaux transnationaux. L’événement a été acclamé et il est célébré aujourd’hui comme le « Jour de la Dignité nationale » car c’est l’acte de souveraineté économique le plus important de l’histoire du pays.

Faisant écho à cet événement, plus de 50 ans plus tard, le président Boric a lancé la Stratégie nationale du lithium soulignant la « grande hauteur de vue » qu’a eu le Congrès pour approuver à l’unanimité la nationalisation de la Grande entreprise minière du cuivre. Néanmoins, à cette occasion, Boric a insisté sur l’importance de pouvoir s’appuyer sur la transversalité pour dynamiser une stratégie profondément remise en question qui menace les écosystèmes fragiles et qui est très éloignée de ce qu’ont exigé les communautés et les organisations. Aujourd’hui, ce ne sont pas les travailleuses et les travailleurs qui débattent de la politique minière mais bien la fameuse alliance publique-privé, dont l’agenda prioritaire est celui de l’entreprenariat et de l’investissement étranger, absolument pas celui de l’ouverture à un débat de fond dans la société.

Il semblerait que le président Boric oublie que le lithium appartient au Chili, car c’est un minerai qui ne peut faire l’objet de concession, représentant un intérêt pour le nucléaire, son exploitation étant contrôlée, mais elle peut être confiée, par le biais de concessions administratives ou de Contrats spéciaux d’exploitation du lithium, à des entreprises privées, comme c’est le cas selon la logique qui prime aujourd’hui.

Mais il ne s’agit pas uniquement de cela. Aujourd’hui le cuivre est dans la ligne de mire – et entre les mains – des entreprises nationales et transnationales. Mieux encore, pour 2022 – selon les données de Cochilco – les entreprises transnationales avaient le privilège de la production du cuivre, car elles atteignaient un peu plus de 70% du total : affaire lucrative – pour un petit nombre –. Par ailleurs, la fièvre de la transition énergétique a maintenu et augmenté l’importance de ce métal dont l’exploitation sans limite a déjà eu des effets sur la santé de la population, l’équilibre des écosystèmes et aussi sur la sécurité des travailleurs et des travailleuses.

Dans de telles conditions, l’exploitation minière du cuivre – qui représente un peu plus de 50% des exportations du pays – suppose une recette extrêmement limitée pour l’État en comparaison des bénéfices des entreprises privées. En ce sens, le mythe du « pays minier » se renforce avec une précarisation accentuée des travailleurs, pays où – selon les données de Cochilco de 2022 – le secteur employait à peine 311. 219 personnes, ce qui est extrêmement bas compte tenu de la force de travail disponible du pays. Par ailleurs, l’exploitation minière du cuivre est caractérisée par la masculinisation du travail, avec 89% d’hommes, où prime la sous-traitance comme régime de travail.

Non seulement le débat actuel sur l’usage des minerais et des métaux doit être large et primordial, mais il doit aussi aborder diverses dimensions qui n’ont pas été abordées précédemment, comme celle de la préservation des écosystèmes, le bien-être des habitants, hommes et femmes, qui préexistaient sur le territoire, et la construction d’alternatives au modèle de développement dominant.

Aujourd’hui la « Dignité » si malmenée doit prendre en considération d’autres éléments que les gouvernements et les entreprises ont écartés. L’élaboration de propositions dans la perspective d’un post-extractivisme semblerait être un bon point de départ pour retrouver une Dignité qui ne se trouve pas dans la bourse des grandes entreprises mais qui doit s’appuyer sur la volonté du peuple.


Javier Arroyo Olea fait partie de l’Observatoire latino-américain des conflits environnementaux (OLCA)

Traduction française de Françoise Couëdel.

Source (espagnol) : https://radio.uchile.cl/2024/07/11/a-53-anos-de-la-nacionalizacion-del-cobre-una-dignidad-que-no-cabe-en-el-bolsillo-empresarial/.

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