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COLOMBIE - Des manifestations avec des consignes racistes, haineuses et élitistes exigent le départ de Petro

Jorge Enrique Botero

mardi 23 avril 2024, mis en ligne par Françoise Couëdel

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Lundi 22 avril 2024.

Il n’y a pas eu de violence mais ce dimanche on a vu et entendu la haine s’exprimer lors des immenses marches qui ont parcouru les rues principales d’une vingtaine de villes de Colombie pour protester contre le gouvernement du président Gustavo Petro. « Dehors Petro ! » était la consigne principale de cette mobilisation, accompagnée d’expressions élitistes et racistes contre le chef de l’État et sa vice-présidente, Francia Márquez, conspuée en raison de ses origines sociales, de sa couleur de peau ou de sa façon de s’exprimer.

Dans la rue étroite qui mène à la Place Bolívar de la capitale – pleine à craquer de quelque cinquante mille personnes –, le quotidien La Jornada a vu défiler les pancartes des manifestants affichant des slogans contre Petro et a écouté les mots d’ordre qu’ils répétaient dans une atmosphère lourde de rage : « Petro, nous ne te laisserons pas nous mener au communisme », « À bas l’étatisation de l’économie », et « Ici, ce n’est pas le Venezuela », qui se mêlaient à des qualificatifs de terroriste et d’assassin, à l’adresse du mandataire, reproduisant la phrase utilisée par Javier Milei il y a quelques semaines qui a failli compromettre les relations entre la Colombie et l’Argentine.

Les manifestants, dans une large majorité, des adultes et des personnes d’un certain âge, répétaient à l’infini une longue liste de fausses informations qui ont précédé les marches, selon lesquelles le pays est au bord du gouffre pour ce qui est de l’économie et s’oriente vers une dictature pour ce qui est de la politique.

Face à cette avalanche d’affirmations sans fondements, des dirigeants sociaux et des partis de gauche ont proposé au gouvernement d’utiliser les moyens de communication publics pour faire de la pédagogie concernant la portée des initiatives gouvernementales en cours. L’écrivain Germán Ayala Osorio a appelé le président à « démentir à l’intention de ces manifestants ce qui a justifié leur présence dans les mobilisations massives : des mensonges ou des interprétations erronées des objectifs des réformes que propose le gouvernement ».

D’autres affirment que les transformations fondamentales du système de santé, ainsi que celles des pensions et du secteur du travail, ont transformé le Pouvoir législatif en champ de bataille sur lequel les forces de l’establishment affrontent la coalition du gouvernement et ses alliés affaiblis, tandis que la presse traditionnelle encourage vivement la polarisation de la société.

Selon certains chiffres en rouge de l’économie et dans une ambiance surchauffée de violence dans de vastes zones rurales où, selon l’opposition, l’État a perdu le contrôle des groupes armés irréguliers de diverses origines, le gouvernement se retrouve à mi-mandat avec une baisse de popularité qui se reflète dans des enquêtes récentes qui donnent jusqu’à 60% de rejet.

Laura Sarabia, directrice du département administratif de la Présidence et considérée comme la plus proche de l’Exécutif, a reconnu l’ampleur de ces marches et a déclaré que le gouvernement se donne « une semaine afin de faire face à ce moment, pour réfléchir et faire son autocritique ».

Petro a utilisé son moyen d’expression favori – son compte X – et a déclaré qu’il respecte les contestataires, mais il a adressé une fois de plus une mise en garde sur leur objectif qui est « de renverser le gouvernement du changement ».

Le chef de l’État a évalué à 250 000 le nombre des manifestants et déclaré qu’ils ont été poussés par « ceux qui se croient les détenteurs de l’argent public, qui rejettent les réformes pour s’attirer les classes moyennes, en encourageant la haine et le mensonge. Ils disent que le président est un guérillero ou bien que, de par ses origines populaires, il ne nous représente pas ou, parce qu’il est de gauche, il ne doit pas gouverner. La haine est le fondement même du message »

Le ministre de l’intérieur Luis Fernando Velasco, a indiqué que les manifestations « se sont déroulées dans la paix et la tranquillité » et que le gouvernement en a assumé toutes les garanties.

Des activistes des réseaux sociaux ont comparé la manifestation à un championnat de football : « Ce dimanche, c’était le match aller, le match de retour sera le 1er Mai », faisant allusion à la demande de Petro aux centrales ouvrières pour qu’elles l’autorisent à participer à la marche et à prendre la parole lors de la Journée internationale du travail.


Jorge Enrique Botero est un journaliste et écrivain colombien, membre de l’équipe qui a fondé Telesur, et correspondant du quotidien mexicain La Jornada à Bogotá.

Traduction française de Françoise Couëdel.

Source (espagnol) : https://estrategia.la/2024/04/22/marchas-con-consignas-clasistas-racistas-y-de-odio-piden-la-salida-de-petro/.

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