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DIAL 2611
MEXIQUE - Le neuvième anniversaire du soulèvement zapatiste
jeudi 16 janvier 2003, mis en ligne par
Après deux années de silence, les zapatistes ont, à l’occasion du neuvième anniversaire de leur soulèvement, organisé une manifestation regroupant 15 000 ou 30 000 manifestants (selon les sources) à San Cristóbal de Las Casas, le 1er janvier 2003. Les mêmes revendications de fond sur les droits des peuples indigènes ont été renouvelées, de même que la dénonciation des partis politiques mexicains qui ont refusé d’approuver la loi telle qu’elle était soumise à leur vote il y a deux ans et qui aurait sans doute permis de mettre fin à cette « guerre ». De vigoureuses critiques ont été faites sur la politique menée par le président Fox. On relèvera aussi une solidarité affirmée avec d’autres causes dans le monde (peuple basque, pauvres argentins, etc.). On ne peut qu’être frappé, une fois de plus, par la volonté sans faille de poursuivre la lutte et la revendication permanente de liberté, de justice et de dignité. Nous publions ci-dessous un florilège de quelques paroles prononcées au cours de la manifestation par les commandants zapatistes, telles que la presse mexicaine les a retransmises.
La commandante Esther (à l’adresse du président Fox) :
« Je veux seulement te dire que le peuple est fatigué des mensonges que tu commets. »
« Où est la paix ? Au début, tu avais déclaré que tu résoudrais les problèmes des indigènes, et maintenant il ne t’importe pas de porter atteinte à l’effort de ceux qui t’ont fait président. »
« Nous ne nous sommes pas soulevés en armes il y a neuf ans pour demander des aumônes, mais pour obtenir une démocratie dans la justice et la dignité. »
Le commandant Omar :
« Nous sommes venus vous dire que nous sommes ici et que nous sommes toujours vivants. Nous ne nous sommes pas rendus. Nous ne sommes ni désunis ni divisés. Pourquoi devrions-nous nous bagarrer entre nous alors que nous avons toujours quelqu’un contre qui nous battre ? »
Le commandant Bruce Lee :
« Nous n’avons pas à demander au gouvernement la permission d’être libres. »
« Nous n’avons à lui demander de permission pour rien du tout. »
« Nous nous sommes levés en armes en 1994 pour une cause digne et juste. Notre lutte n’est pas seulement pour les peuples indigènes ; elle est pour tous, hommes et femmes, indigènes et non indigènes. »
« Ce que veulent les gouvernements, c’est nous détruire et nous exterminer. Mais nous ne le permettrons pas.Nous allons nous défendre à tout prix. La terre appartient à qui la travaille. Notre terre est notre mère. Nous ne vendons pas notre mère. Nous ne permettrons pas qu’un fils de pute nous l’enlève. Nous ne tomberons pas dans le piège. On ne peut pas nous tromper, nous les zapatistes. Encore moins nous conquérir. »
Le commandant David :
« L’heure est venue de parler de nouveau. Nous exigeons qu’ils nous traitent avec égalité et justice. C’est pourquoi nous sommes venus manifester à San Cristóbal de Las Casas. »
« Nous n’avons pas besoin du soutien du gouvernement avec ses bricolages, mais qu’il reconnaisse la libre détermination de tous les indigènes. Nous exigeons qu’il nous traite avec égalité et justice. Nous sommes appauvris, mais ni mendiants ni délinquants. »
Le commandant Tacho :
« Au Mexique, il n’y a pas un seul bon parti, comme les faits l’ont montré ; le PAN [1], le PRI [2], le PRD [3] se moquent de tous les peuples indiens, de tout le peuple qui a soutenu la reconnaissance de nos droits et de tous les gens du monde entier qui les ont aussi soutenus. »
« Les sénateurs et la direction du PRD n’ont pas voté la loi Cocopa parce que, s’ils l’avaient approuvée, on aurait obtenu la paix et l’EZLN (Armée zapatiste de libération nationale) se serait mise à faire de la politique de manière ouverte, et cela ne plaît pas au PRD (par crainte de se voir prendre sa clientèle électorale et d’y perdre ses prébendes). »
« Aujourd’hui, le PRD dit que le problème indigène est très important pour lui, mais nous les zapatistes nous n’oublions pas, nous avons une très bonne mémoire. Il suffit de rappeler que les sénateurs Jesús Ortega et Demetrio Sodi ont défendu une loi qui refuse tout droit aux peuples indigènes du pays. »
« Si cette loi avait été approuvée, on serait en paix et le gouvernement de Fox serait un gouvernement fort, mais Cevallos (membre du PAN, chef d’orchestre du refus de la loi Cocopa) veut que Fox soit faible car il veut devenir président du Mexique même avant 2006. Il veut transformer le Mexique en une grande hacienda. »
Le commandant Mister :
« Nous disons aux puissants que s’ils veulent mondialiser la mort, nous allons mondialiser la dignité et la liberté. »
– Dial – Diffusion d’information sur l’Amérique latine – D 2611.
– Traduction Dial.
En cas de reproduction, mentionner la source francaise (Dial) et l’adresse internet de l’article.
[1] Parti d’action nationale, parti du président Fox.
[2] Parti révolutionnaire institutionnel, qui fat au pouvoir pendant 70 ans, jusqu’à l’élection du président Fox.
[3] Parti révolutionnaire démocratique, qui, selon les propos du même commandant Tacho, « se fait appeler ‘de gauche’ ».