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DIAL 3683
BRÉSIL - Lettre aux amies et amis
Xavier Plassat
vendredi 22 décembre 2023, mis en ligne par
Chers amis, chères amies du « réseau Brésil/CPT »,
Tudo bem ?
Depuis le début de cette année 2023, je suis revenu habiter dans la ville d’Araguaína, siège de notre Commission pastorale de la terre (CPT), non loin du village où, avec une petite communauté dominicaine, j’avais passé les 11 dernières années. J’y continue le même travail, principalement orienté vers la lutte contre l’esclavage moderne.
Vous êtes partie prenante de nos combats depuis tant d’années ! Promouvoir un peu de justice sur cette terre d’Amazonie est notre mission, toujours si nécessaire et même plus que jamais quand nous voyons l’état préoccupant de notre planète. C’est ce que rappelle cette image produite par le REPAM (Réseau ecclésial pour la pan-Amazonie).
Un nouveau et très grand merci pour votre attention si fidèle !
Je viens partager avec vous quelques moments et informations importants de l’année écoulée.
Le 17 avril dernier, jour anniversaire du massacre de paysans sans-terres d’Eldorado dos Carajás (en 1996… déjà 25 ans !), la CPT nationale a lancé à Brasilia son Rapport annuel sur les conflits dans les campagnes, avec un registre alarmant de plus de 2 000 conflits constatés dans l’ensemble du Brésil, en lien avec l’accès à la terre, la protection de l’eau et de la forêt, ou encore la dignité du travail. Une situation qui affecte particulièrement les groupes accompagnés par la CPT dans notre État du Tocantins, au nord du Brésil.
Ce sont par exemple les nouveaux épisodes de violence enregistrés dans la « Tauá », un petit territoire revendiqué par 60 familles de posseiros, c’est-à-dire des gens qui sont nés là et y ont grandi. L’un de ces paysans, Valdinez P. dos Santos, un des leaders respectés de l’Articulation Paysanne pour la lutte et la défense des territoires, a été de nouveau l’objet de la brutalité d’une dizaine d’hommes armés, à la solde d’un grileiro (accapareur de terres), connu comme Pedro Amaro et chargés par lui de « nettoyer le terrain » pour qu’il puisse y implanter de nouveaux champs de soja, une culture qui fait fureur dans cette région de savane, connue comme « Cerrado ».
Sans répit depuis des années, Valdinez est accusé par Pedro Amaro – le véritable envahisseur des terres de ces paysans – et ses sbires d’inciter à la violence et à l’invasion de terres dans la région.
Ce 17 avril, il a été lâchement attaqué, roué de coups de poing et de crosse de fusil, qui l’ont blessé surtout à la tête et au visage. Grièvement touché, il a réussi à s’échapper et à rejoindre le plus proche village, Morro Grande, à la recherche de secours.
Près de 30 dénonciations à la police avaient déjà été réalisées depuis novembre 2022 – après qu’un autre paysan a été agressé, mais la Police civile du Tocantins n’a pris aucune mesure. Pourtant le territoire de la Tauá fait partie du domaine public. C’est ce que confirment les documents joints au procès en cours devant la justice.
Au cours des derniers mois, les familles ont été victimes de violences en série : incendie de leurs masures, agressions verbales et physiques, tentatives d’expulsion, déforestation sauvage, contrôles sur la route d’accès, destruction de clôtures. Défendues par l’avocate de notre CPT, elles ont obtenu du juge d’instance une ordonnance d’interruption immédiate de toute action violente de la part du grileiro et de ses hommes de main. Les violences n’ont pas cessé pour autant, ce qui a engendré le dépôt de nouvelles plaintes, accompagnées de photos et de vidéos, et une nouvelle requête auprès du juge, qui a de nouveau ordonné l’interruption des violences, cette fois sous peine d’une astreinte de 500 000 réaux (presque 100 000 euros) pour chaque parcelle envahie par le grileiro, et de poursuites pénales en cas de récidive. Cette fois, la riposte des pistoleiros a encore été plus vigoureuse, comme pour dire : « Ici, la justice c’est nous ! »
Les familles ont continué à enregistrer plainte sur plainte, sans illusion toutefois quant à l’action de la police et de l’État et au possible respect des décisions de la justice. Le 16 avril, alors qu’elles tenaient une réunion dans l’une des maisons du hameau de la Tauá, des hommes armés ont fait irruption et tenté de s’emparer des véhicules présents, ont intimidé et menacé les posseiros présents. Le jour suivant, alors qu’ils s’apprêtaient à déposer une nouvelle plainte au commissariat, ils ont de nouveau été attaqués par ces hommes en armes, qui s’en sont pris alors brutalement à leur leader, Valdinez.
Sous l’effet de la peur, les paysans se sont retirés.
Un véritable désespoir s’est répandu parmi les habitants de la région, frustrés de leur droit légitime à cette terre qui est publique. La solution véritable dépendrait d’une action déterminée de la justice et de l’État. Par le moyen d’une déclaration publique et par la poursuite de nos revendications auprès du pouvoir judiciaire et de l’exécutif, notre CPT s’emploie à alerter la société et à obliger les autorités à agir et mettre fin à cette spirale odieuse de violence, pratiquée en plein jour, en toute impunité. Par la force, ces tueurs à gages et leurs puissants commanditaires entendent s’affirmer chez nous comme les vrais juges, les véritables autorités, avec droit de vie et de mort sur des dizaines de familles.
Ce cas en dit long sur les difficultés et les défis auxquels le Brésil de « l’après Bolsonaro » (après 4 années à la présidence du pays, celui-ci a dû laisser place au nouvel élu : Lula) continue à être confronté. Le changement de gouvernement s’est fait le 1er janvier, mais le Brésil a connu au long de l’année 2023 une augmentation des conflits, comme s’il s’agissait d’une partie de bras-de-fer, pratiquée contre le nouveau pouvoir, de la part de groupes dominants (groupes économiques relayés par une représentation politique forte), qui comptaient jusque-là sur la complicité active de l’État pour mener leurs activités criminelles : grilagem de terres, invasion de territoires de peuples autochtones, exploitation illégale de mines, déforestation sans limites, travail esclave. De sorte que les changements espérés tardent à se manifester.
La nomination de nouveaux responsables pour les institutions en charge des questions agraires s’est particulièrement fait attendre, signe inquiétant du niveau de conflit et des marchandages en cours dans les coulisses du monde politique.
Le jour du 37e anniversaire du martyre du Père Josimo – ce prêtre noir de 33 ans, alors coordinateur de notre jeune CPT dans la même région où je suis, et connue comme « Le Bec du Perroquet », a été assassiné le 10 mai 1986 sur l’ordre de grands fermiers – a été rendue publique la nomination de notre collègue Edmundo, membre de notre équipe régionale de la CPT Tocantins depuis une vingtaine d’années, au poste de directeur de l’INCRA (Institut de colonisation et réforme agraire), section du Tocantins. Cette nouvelle nous remplit d’espoir, nous et les groupes de paysans qui attendent la reprise d’une politique de réforme agraire vigoureuse. En même temps nous savons dans quel état de déliquescence Edmundo va trouver les structures de l’INCRA après toutes ces années d’abandon. Aura-t-il réellement les moyens d’enrayer le cycle de ces violences ?
Une des premières mesures mises en œuvre par le nouveau directeur a été la convocation au siège de l’INCRA des membres de l’Articulation paysanne (une sorte de coordination permanente des divers groupes accompagnés par notre CPT) pour une audience portant sur tous les territoires de notre région actuellement en conflit ou en attente de mesures relevant de la compétence de l’INCRA. Selon le communiqué diffusé par la CPT :
Le 01/08/2023, des représentants de l’Articulation paysanne du Tocantins et de la CPT régionale Araguaia-Tocantins ont été reçus à la direction de l’INCRA pour présenter leurs revendications relatives à l’accès à la terre ainsi qu’à l’amélioration des conditions de vie et de production de l’agriculture familiale.
De bons espoirs sont permis : les dirigeants des 16 communautés paysannes présentes (assentamentos, occupations, campements de sans-terre, quilombos) ont pu présenter leurs revendications respectives, y compris leurs plaintes concernant l’exploitation forestière illégale pratiquée dans les réserves des assentamentos et l’intensification des violences provoquées par les accapareurs de terres et l’agrobusiness.
Le nouveau directeur de l’INCRA a souligné la nécessité d’instaurer un dialogue ouvert et permanent avec les communautés et les entités impliquées dans la réforme agraire. Il a en outre exprimé son engagement d’adopter les mesures concrètes qui s’imposent pour répondre aux problèmes soulevés par les paysans au cours de la réunion.
Quelques semaines plus tard, en septembre, s’est déroulée la 12e Rencontre des groupes paysans accompagnés par la CPT Araguaia Tocantins, préparée conjointement avec l’Articulation paysanne, réunissant pendant 3 jours près de 200 paysans et paysannes : assentados, acampados, quilombolas et représentants de mouvements partenaires venus de l’État voisin du Maranhão, du Mouvement des sans terre ainsi que d’organismes publics : INCRA et Université fédérale du Tocantins.
Le thème central de la rencontre, « Organisation sociale, accès et permanence sur la terre », a suscité des discussions approfondies sur les conditions de la lutte paysanne pour la terre et le « bien-vivre ».
Réalisée au sein du territoire quilombola du Grotão (commune de Filadéfia, Tocantins), cette rencontre a permis une reprise de la mobilisation (trop longtemps affectée par la pandémie du COVID), dans une conjoncture politique assez prometteuse quoique parsemée de contradictions. Le nouveau directeur de l’INCRA a participé à cette rencontre durant toute une journée et a pu exposer ses projets d’action. Les communautés participantes ont présenté et débattu des défis auxquels elles sont confrontées et souligné l’importance d’une organisation forte pour mener à bien leurs luttes de résistance contre l’accaparement des terres et face aux incertitudes de la politique agraire du pays. Au niveau même de notre État (le Tocantins), le gouverneur actuel est un partisan déclaré de l’agrobusiness. Il a déjà fait savoir qu’il n’épargnerait aucun effort pour empêcher « l’invasion » des terres et garantir la « sécurité juridique » à la propriété privée, ce qui en clair signifie mettre en œuvre toute la force policière pour expulser des terres publiques qu’ils occupent les groupes paysans qui exigent leur droit à vivre sur ces terres. Pire : des projets de loi sont en discussion au parlement de notre État, visant à légitimer l’accaparement de terres publiques. L’un d’eux prévoit de transférer au profit de l’État du Tocantins les terres publiques qui aujourd’hui appartiennent à l’État Fédéral, ceci dans le but avoué de pouvoir en régulariser l’appropriation par les accapareurs de vastes domaines aujourd’hui objets de grilagem.
Avec l’INCRA, les relations commencent réellement à changer : dès le 29/09, par exemple, une autre communauté paysanne, celle de Santo Antônio Bom Sossego (photo ci-dessous), a reçu sur son territoire un responsable de l’INCRA afin de préparer les documents que les familles devront présenter pour effectuer la régularisation de leurs parcelles, promise pour cette fin d’année.
Dans le même souci de renforcer nos capacités d’agir en réseau, nous avons réalisé au cours des derniers mois une rencontre des CPTs des quatre États de la Grande Région Nord du Brésil, dans le but de renforcer nos stratégies communes et de réaliser un important moment de formation collective. La rencontre a eu lieu à São Luís do Maranhão, ville du littoral du Nordeste du Brésil, du 26 au 28 juillet. En avril avait eu lieu à Araguaína une rencontre également importante, celle de l’Articulation du MATOPIBA (mot composé des initiales de chacun des États du biome Cerrado, où se concentre la monoculture du soja et la pression de l’agrobusiness sur la paysannerie locale : MAranhão, TOcantins, PIauí, BAhia).
C’est de nouveau à São Luís (où en 2025 la CPT célèbrera un Congrès national marquant les 50 ans de sa fondation) que nous venons de conclure une semaine de formation destinée à 35 éducateurs de la CPT venus de 10 États, membres de notre Campagne nationale contre l’esclavage.
C’est de São Luis que j’embarquerai d’ici peu pour Santiago du Chili où m’attend une série d’activités organisées cette semaine par des partenaires locaux pour faire avancer la politique chilienne de lutte contre le travail esclave, pour laquelle, nous disent-ils, l’exemple du Brésil est une forte inspiration. J’y présenterai le film Pureza que, j’espère, vous avez déjà eu l’occasion de voir : il conte l’épopée courageuse – et réelle – d’une femme nommée Pureza [« Pureté »], originaire du Maranhão, que le cinéaste brésilien Renato Barbieri a porté à l’écran [1]. Ce scandale du travail esclave « moderne » continue à susciter étonnement, incrédulité et résistance. Le Brésil aura, depuis 1995, libéré de cette condition plus de 60 000 personnes, dont près de 3 000 au cours de cette année. Ici aussi une politique plus aguerrie est à l’ordre du jour.
L’explosion récente des cas de travail esclave expose au grand jour l’aggravation de la vulnérabilité résultant de la politique destructrice menée au cours des dernières années, accentuant une offre de main d’œuvre « à bon marché », dans un contexte de « laissez-faire, laissez-passer » ouvrant la porte à des violations de tous ordres – touchant principalement les conditions de travail et l’environnement –, et le renforcement d’un discours idéologique de banalisation de pratiques criminelles dirigées contre les groupes sociaux les plus fragilisés : populations autochtones, sans terre, afro-descendants.
Le cas le plus commenté de cette année a été celui des 210 saisonniers employés dans les vignes de Bento Gonçalves, région connue pour ses « grands crus » et située dans le Rio Grande do Sul, un État peuplé en majorité de descendants d’immigrants européens venus au Brésil après l’abolition de l’esclavage. Ces travailleurs saisonniers, à 95% noirs ou métis, avaient été embauchés dans le Nordeste (surtout la Bahia) par un fournisseur de main d’œuvre et étaient traités dans les pires conditions, y compris de violence physique et morale. Après leur libération ont foisonné localement les discours de discrimination fustigeant ces travailleurs migrants et ingrats, incapables de remercier pour la faveur qui leur aurait été faite de trouver ici un emploi.
Un exemple éloquent de la permanence d’une culture esclavagiste qui a encore de beaux jours devant elle chez certaines « élites » du Brésil : le cas récent de travail esclave domestique dont a été victime depuis ses 12 ans et pendant plus de 40 ans, une femme nègre prénommée Sonia, sourde et muette de naissance. Un cas parmi d’autres dans la centaine de cas de travail esclave domestique identifiés depuis 2017. Le patron de Sonia est un haut magistrat de l’État de Santa Catarina, au sud du Brésil. Il bénéficie du privilège de juridiction auprès du Tribunal supérieur de justice ; il a plaidé la thèse, devenue courante en pareille situation, selon laquelle Sonia, loin de pouvoir être considérée comme victime de condition analogue à de l’esclavage, avait au contraire été de tout temps considérée et traitée comme un membre de sa famille, au point qu’il avait décidé d’initier (mais seulement maintenant…) un processus légal en vue de son « adoption affective ». Contre toutes les évidences, le patron de Sonia prétend donc que cette femme était traitée « quasiment » comme sa fille adoptive, imaginant ainsi s’en tirer à bon compte : manifestation cynique de ce que nous appelons la banalisation de la culture esclavagiste.
Les preuves présentées par les autorités qui ont réalisé la libération de Sonia (police fédérale, inspection du travail, parquet) ont été invalidées par le juge du Tribunal supérieur de justice (SJT), puis ce juge, en violation totale des protections garanties à la victime en pareil cas, a suspendu l’instance en cours devant la justice du travail, décrété le secret de justice, écarté et mis sous investigation l’inspecteur du travail responsable et, pire encore, concédé au patron de Sonia le droit de lui rendre visite dans la maison de soins spécialisée où elle venait d’être accueillie pour y recevoir une assistance psycho-sociale et apprendre – pour la première fois de sa vie – à communiquer en Langue des signes (Libras) et à commencer à lire et écrire.
Le juge lui a concédé le droit de lui proposer de « revenir vivre auprès de sa famille », ce à quoi elle aurait « consenti » sur le champ. Voici de nouveau esclave cette femme qui, de toute sa vie, n’a jamais connu de situation familiale ou de travail autre que celle du huis-clos de la maison où elle vient d’être ramenée.
Rien n’y a fait : un habeas corpus tenté par le Défenseur public fédéral a été rejeté, y compris devant la Cour suprême (par une décision monocratique qui doit être soumise à ratification de la Cour en formation plénière). En grande part favorisée par une scandaleuse solidarité corporative, cette situation absurde, si elle était confirmée, retirerait toute légitimité à la politique nationale d’éradication du travail esclave et pourrait créer un terrible précédent.
En tant que représentante de la société civile au sein de la Commission nationale pour l’éradication du travail esclave (CONATRAE), notre CPT a immédiatement réagi : en provoquant une réunion extraordinaire de la CONATRAE, en formant consensus autour d’une note publique de la CONATRAE dénonçant les faits, en requérant la convocation d’une audience publique au Parlement sur ce sujet, et – avec notre habituel partenaire international en ces matières, le CEJIL – en adressant à la Commission interaméricaine des droits humains de l’Organisation des États américains (CIDH/OEA) une information alertant celle-ci sur cette grave série de violations actuellement toujours en cours, sollicitant son intervention, en accord avec l’article 41 de la Convention américaine relative aux droits humains (CADH). Nous avons pour cela reçu l’appui de plusieurs organisations brésiliennes importantes [2] avec lesquels nous pensons aussi nous adresser à diverses instances de l’ONU, ainsi qu’au Conseil national de justice. Par ailleurs, nous avons présenté une requête devant la Cour suprême pour être admis comme amicus curiae dans le procès en cours.
Voilà donc une nouvelle action qui s’ajoute au travail quotidien des agents de notre Campagne : visites in-situ, écoute, production et distribution d’informations visant à mieux comprendre et rendre visible la réalité du travail esclave, organisant avec les communautés les plus vulnérables une stratégie de vigilance, de prévention et de lutte contre ce crime.
Finissons sur une note plus réjouissante : en 2017 la Cour interaméricaine des droits humains basée à San José, au Costa Rica, a condamné le Brésil dans l’affaire « Brasil Verde », pour avoir permis que 128 personnes aient été maintenues en régime d’esclavage dans la fazenda Brasil Verde (un cas qui, à l’époque, en 2002, avait été initié par Henri Burin des Roziers). La sentence rendue obligeait l’État à payer à chacune des victimes une réparation financière de 30 à 40 000 dollars ; affirmait l’imprescriptibilité du crime d’esclavage et exigeait que soient mis en jugement les propriétaires de la Brasil Verde ; appelait à combattre par des politiques substantielles la discrimination structurelle historique qui explique au Brésil la permanence des pratiques esclavagistes ; et, enfin, interdisait tout recul en la matière. Deux nouvelles à ce sujet :
– 25 ans après les faits reprochés, la justice fédérale du Pará vient, en juin dernier, de condamner à 7,5 années de réclusion João Luiz Quagliato Neto, propriétaire (à la tête d’un empire dans la culture de la canne-à-sucre, dans l’État de São Paulo), ainsi que l’administrateur de son immense domaine.
– Un ouvrier agricole prénommé Renato figurait parmi les 128 victimes indemnisables. Depuis 25 ans sa famille (dans le Maranhão, Nordeste) le tenait pour mort, en fonction de récits convergents qui lui étaient parvenus. Or voici que, grâce à une coïncidence inouïe, son nom est réapparu début 2023 : une assistante sociale s’est étonnée auprès son frère José Ronis d’une homonymie de filiation sur un fichier d’aide sociale aux gens des rues. C’était bien lui : Renato, aujourd’hui âgé de 61 ans. Vivant ! José Ronis s’est alors empressé d’aller rencontrer son frère Renato dans l’intérieur de l’État du Pará et de lui offrir de vivre désormais avec sa propre famille. Après une réunion en ligne avec les deux hommes, où j’ai pu vérifier l’authenticité de l’histoire, nous avons immédiatement mis en œuvre les formalités requises : documentation légale, ouverture de compte bancaire, et rendu possible le paiement, déjà effectif, de l’indemnité due à Renato (30 000 dollars) par l’État brésilien. Comme un air de résurrection !
Je n’ai pas besoin de commenter ici tant d’autres conflits et de guerres qui affligent notre planète en cette fin d’année et nous remplissent d’indignation, de tristesse et de honte, sinon de désespérance sur l’humanité. Qu’à la veille de Noël nous sachions continuer à proclamer le message de Jésus : tous frères et sœurs, fils et filles que nous sommes du même Père des cieux, pétris de la même terre. Notre foi, oui ! elle est le contraire de la peur.
C’est le beau message que nous invite à méditer une petite animation que, en hommage à la CPT, l’un de nos partenaires du Brésil (Repórter Brasil) vient de nous offrir (traduction française).
Joyeux Noël !
Fr. Xavier P., Araguaína, le 3 décembre 2023 [3]
– Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 3683.
– Source (français) : lettre envoyée par l’auteur le 7 décembre 2023.
En cas de reproduction, mentionner au moins l’auteur, la source française (Dial - www.dial-infos.org) et l’adresse internet de l’article.
[1] Je retrouve ce très beau commentaire reçu de Jean-François Bernardini, artiste du groupe corse I Muvrini et président d’Umani (Fundazione di Corsica), organisation qui, très fidèlement, soutient notre CPT depuis des années :
Pureza. Éclatant de lumière, ce film vient bousculer les cœurs et les consciences. Il nous projette au centre d’une réalité scandaleuse qui fait des hommes ses esclaves, victimes de stratagèmes diaboliques au cœur du Brésil, et ailleurs de par le monde. Dans les visages, dans les courages, dans les yeux qui poussent des cris, le fil rouge des résistances nous guide sur le chemin de croix de ses travailleurs esclaves. Là, rien n’est plus émouvant que la vérité qui éclate et triomphe au grand jour. C’est bien pour cela que Pureza est bouleversant. C’est bien pour cela qu’il nous invite sur la route haute des solidarités et des luttes citoyennes. Sur une toile de souffrances, d’émotions justes qui crèvent l’écran, la lumière de Pureza illumine nos espoirs. Ne dit-on pas que les souffrances et l’espoir sont la moindre des choses pour réaliser une œuvre magistrale ? Il y a des histoires et des luttes qui, parce qu’on les raconte avec justesse et talent, peuvent nous aider à triompher ensemble des oppressions les plus basses et les plus cyniques. Pureza est un film de libération. Il nous prend par la main. Pureza est un hymne à l’humanité debout. Il nous encourage. Pureza est un film de combat. Il est une œuvre de première nécessité.
[2] Confédération nationale des travailleurs ruraux salariés – CONTAR ; Fédération nationale des travailleurs domestiques – FENATRAD ; Institut pour le travail décent – ITD ; Syndicat national des inspecteurs du travail (SINAIT) ; Association nationale des inspecteurs du travail – ANAFITRA ; Association nationale des procureurs du travail – ANPT ; Association nationale des procureurs de la République – ANPR.
[3] Chères amies et chers amis du Réseau,
à partir de ce mois de décembre 2023, le circuit habituel de vos contributions financières (toujours aussi nécessaires !) va devoir changer : en effet l’association CEFAL qui, auprès de la Conférence des évêques de France, avait mis à notre disposition son compte et les possibilités de déduction fiscale que son statut permettait, vient d’être dissoute. Il vous faudra donc à l’avenir, en attendant mieux, envoyer vos dons directement sur mon compte bancaire personnel ouvert à la Société générale, dont les coordonnées sont mentionnées ci-dessous. Je suggère de confirmer chacun de vos transferts par un petit mail (xplassat chez gmail.com) ou message WhatsApp (+5563992219957). Je suis sûr que cela n’affectera pas votre disposition à continuer à nous aider ! Un grand merci et un très bon Noël à tous et à toutes !
Coordonnées bancaires à la Société générale
Xavier Plassat
RIB : 30003 01200 00051455567 60
IBAN : FR76 3000 3012 0000 0514 5556 760
BIC-Swift : SOGEFRPP
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