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DIAL 3672

BRÉSIL – 15e Rencontre inter-ecclésiale des CEB : Gratitude et défis

Marcelo Barros

vendredi 29 septembre 2023, mis en ligne par Dial

Dans ce texte publié le 21 août 2023 sur le Portail des CEB (Brésil), Marcelo Barros, moine bénédictin, théologien, bibliste et conseiller des communautés ecclésiales de base (CEB) et des mouvements sociaux, esquisse un premier bilan de la 15e Rencontre inter-ecclésiale des CEB qui s’est tenue à la mi-juillet à Rondonópolis (Mato Grosso) [1].


Pour les personnes qui ont eu la chance de participer à la 15e Rencontre inter-ecclésiale des CEB , la première réaction ne peut être, sans aucun doute, qu’une réaction de gratitude envers Dieu et envers les frères et sœurs de l’équipe de coordination et des différentes équipes de service qui ont préparé et mis en œuvre l’organisation cette rencontre inter-ecclésiale.

Il était 18 heures, le mardi 18 juillet, lorsque le dernier bus affrété par la CNBB [2] de la région du Mato Grosso est arrivé au Centre culturel de l’un des quartiers de Rondonópolis (Mato Grosso), site des assemblées plénières de la 15e Inter-ecclésiale des CEB. J’arrivais à peine dans le local qui, tout au long de la rencontre, a été dénommée « Maison commune », quand j’entendis la voix de Mgr Maurício da Silva Jardim, évêque diocésain, annoncer : « Je déclare ouverte la 15e Rencontre inter-ecclésiale des communautés ecclésiales de base ».

En m’approchant de la scène où l’équipe de coordination accueillait les participants, je repérai et saluai un grand nombre de personnes connues. Joie de retrouver les membres des CEB de Recife, du mouvement Rencontre de Frères, dont j’ai été, jusqu’à ces dernières années, l’assesseur et l’officiant. Je rencontrai les représentants des CEB du Pernambouc, que j’ai eu l’occasion de côtoyer, à plusieurs reprises, lors des réunions au Sanctuaire des communautés à Caruaru. Et aussi des participants venus de tout le Brésil. Et bien sûr, un certain nombre d’assesseurs que je rencontre toujours dans ces réunions inter-ecclésiales, depuis la VIe Rencontre, à Trindade, en 1986, où, pour la première fois, je participai au groupe national des assesseurs. (Aux deux rencontres précédentes, je ne participai qu’en tant que délégué mais pas comme conseiller). Par ailleurs, beaucoup de personnes nouvelles étaient présentes, ce qui est fort positif.

Lors de cette réunion à Rondonópolis, je n’ai pas été invité à conseiller une assemblée plénière ou un « biome » [sous-groupe] et j’ai apprécié que cette tâche soit confiée à des gens des régions et à des jeunes. Pour l’avoir proposé, sans y avoir été invité, j’ai seulement aidé l’équipe qui préparait la célébration œcuménique. Et j’étais heureux de participer ainsi, comme participant et spectateur ordinaire, plutôt qu’avec un rôle de conseiller.

1.- Premières impressions

Toutes les personnes avec lesquelles j’ai parlé, et qui ont participé à d’autres rencontres inter-ecclésiales, ont confirmé mon impression que cette rencontre était l’une des mieux organisées, avec une structure qui fonctionnait bien à 100% à tous les niveaux. Malgré toutes les difficultés et les défis que l’équipe élargie en charge de la préparation et de l’organisation a dû affronter, les participants ont bénéficié d’une organisation impeccable et extrêmement efficace.

Tout d’abord, les célébrations, préparées par l’équipe du réseau « Célèbre », ont été excellentes. Cela a donné à la rencontre le ton juste de prophétie et de spiritualité dont elle avait besoin. La célébration initiale a sans aucun doute été la meilleure, la mieux coordonnée et la mieux réussie de toutes les célébrations d’ouverture que j’ai jamais vues dans les inter-ecclésiales auxquelles j’ai participé. Légère, profonde et touchante.

En tant que signe nouveau et important à l’heure actuelle, je bénis Dieu pour la réalisation prophétique d’une agapé eucharistique lors de la célébration d’ouverture. Je remercie Dieu d’avoir participé à cette agapé, présidée par une femme (Marilza Schuína) qui a chanté une prière eucharistique alternative, composée par le regretté Reginaldo Veloso. Il s’agissait clairement d’un acte prophétique qui montre la voie aux CEB et aux communautés du « cheminement » [3] : nous devons libérer la Cène de Jésus de la prison dans laquelle elle se trouve comme culte clérical et sacré, détachée de la communion affectueuse de vie et de partage, comme devrait l’être la célébration du repas pascal du Christ.

L’organisation de la 15e Inter-ecclésiale en assemblées plénières et en sous-groupes – Maison commune et biomes – a été excellente. Le simple fait d’avoir choisi ces appellations déjà était important. Les mots sont forts et expressifs. Le fait même que les participants aient été organisés par biomes était en soi significatif et basé sur la spiritualité écologique. Et ce souci de spiritualité écologique est apparu à tout moment et dans toutes les situations. L’impression est que toutes les personnes qui ont participé se sont senties très heureuses.

2.- Quelques caractéristiques de la 15e Rencontre

Il convient de souligner ce que signifiait cette rencontre dans la conjoncture actuelle de l’Église catholique au Brésil :

 1.- Tout d’abord, cela signifiait un acte de résistance. Les militants et les personnes du « cheminement libérateur » expriment clairement : nous sommes vivants et nous gardons vivante et forte la prophétie de la spiritualité libératrice.

 2.- Comme lors d’autres rencontres précédentes, celle-ci a également donné le sentiment que les personnes de la base ressentent le besoin de se découvrir participantes à quelque chose de plus large. Quitter le « petit monde de la vie quotidienne » souvent limité par divers facteurs est un signe et un instrument de libération de la spiritualité. Probablement, la première joie est que le peuple en cheminement peut se rencontrer, chanter et crier : Nous ne sommes pas seuls ! Nous sommes nombreuses et nombreux. Et nous sommes ensemble.

 3.- Dans cette rencontre, peut-être plus que dans les inter-ecclésiales plus récentes, il semble que nous ayons repris un élément des deux ou trois premières rencontres inter-ecclésiales : en 1975, l’idée de Dom Luiz Fernandes, alors évêque auxiliaire de Vitória (Espírito Santo), en convoquant la première rencontre, était de réunir les Églises (les diocèses) qui vivaient l’expérience des CEB. À partir de la 4eréunion, cette caractéristique a fini par trop s’élargir et a perdu sa spécificité.

Maintenant, en raison de la réalité plus polarisée de nos Églises locales et aussi du fait que l’ancien conservatisme, plus conservateur aujourd’hui qu’il ne l’était dans les années 1980, déploie un esprit de croisade plus intransigeant, les différences finissent par être plus nettes, et, à nouveau, les personnes viennent à une rencontre comme celle-ci, en général, s’identifient plus clairement, si ce n’est directement aux CEB, du moins avec l’Église du « cheminement libérateur ».

Il en résulte quelques questions à approfondir :

 Dans l’Église catholique, ce que nous voyons, à l’opposé de ce que propose le pape François, c’est une cléricalisation de plus en plus forte, centrée sur le modèle de l’Église de la chrétienté. Quelle est la répercussion de cette réalité pour les CEB ?

 Les CEB d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’en 1975 ou que dans les années 1980. Elles ne le sont pas, ne peuvent pas l’être et ne devraient pas l’être. Le problème est que celles-ci avaient une cohérence et des caractéristiques que nous connaissions bien. Maintenant, les CEB actuelles, comment sont-elles constituées et qu’est-ce qui les caractérise vraiment ? Nous savons qu’il ne s’agit pas seulement de « petites communautés missionnaires » et encore moins de « simples chapelles de l’intérieur ». Nous devons mieux clarifier comment elles s’organisent et s’expriment à notre époque... Il semble urgent de refaire une théologie des CEB…

 Sans vouloir en aucune façon changer la nature de la rencontre inter-ecclésiale, j’attire l’attention sur le fait que cette rencontre avait beaucoup la caractéristique d’une rencontre de l’Église du « cheminement », au-delà des CEB. Je pense que si nous devions passer une carte d’identité à toutes les personnes qui ont participé à cette 15e rencontre, peut-être que la plupart s’identifieraient comme assesseurs des différentes organisations pastorales (Caritas et pastorales sociales) et des mouvements populaires.

Dans les années 1990, la présidence de la CNBB a promu une assemblée des Organismes du peuple de Dieu. Elle a fonctionné trois fois et, même si elle continue d’exister aujourd’hui, elle semble avoir peu de visibilité et je ne sais pas si elle a encore des répercussions concrètes.

Il y a deux ans, dans la construction du processus de synodalité, le pape François a proposé l’Assemblée ecclésiale latino-américaine (novembre 2021) et a accepté la constitution de la Conférence ecclésiale amazonienne (CEAMA), à la place d’une simple conférence épiscopale. Même si, concrètement, cette assemblée n’a pas eu la même force que les conférences épiscopales intercontinentales (Medellín, Puebla et Aparecida), cela était probablement dû en grande partie aux problèmes et aux perspectives des participants eux-mêmes.

Sans vouloir comparer la 15e Assemblée inter-ecclésiale des CEB à une Assemblée ecclésiale plus large, il est vrai que celle-ci a incorporé le style et le visage d’une Assemblée ecclésiale du « cheminement libérateur », plus large que celui d’une simple rencontre nationale des CEB. Comme je l’ai rappelé précédemment, dès le début, les rencontres inter-ecclésiales des CEB sont appelées inter-ecclésiales parce qu’elles ont toujours été les rencontres des Églises qui ont des CEB et pas seulement des CEB. C’était une réunion de l’Église du « cheminement », comme nous l’avons dit dans les premières années : Une Église qui naît du peuple sous le souffle de l’Esprit.

Plus que lors des rencontres précédentes, cette rencontre a été l’occasion de l’expression des pastorales chrétiennes indiennes et noires, en dialogue avec les cultures d’origine. Dans toutes les célébrations et les assemblées plénières, il s’est trouvé que le dialogue et l’insertion des communautés noires et indiennes, du moins dans cette partie de l’Église dans laquelle nous œuvrons, se sont approfondis et ont surmonté les difficultés ressenties durant les rencontres inter-ecclésiales des années 1990, lorsque nous n’étions pas encore capables d’accueillir et d’intégrer pleinement les personnes de traditions indiennes et noires.

3.- Doutes et questions

La fête est l’irruption du temps de la grâce pascale dans la vie des communautés. La fête, qu’elle soit religieuse comme Pâques ou Noël, ou la fête considérée comme profane comme le Carnaval, est toujours un sacrement de communion et une expression importante de la résistance du peuple et de la présence aimante de l’Esprit qui nous anime. Cependant, la fête ne remplit cette fonction sacramentelle que si elle est basée sur la vie quotidienne de l’expérience communautaire. Sans cela, la fête est sans base comme une maison sans fondation ou une plante sans racine.

Probablement, pour la plupart des gens qui suivent le « cheminement libérateur » (et depuis si longtemps, comme c’est mon cas), la première grande question est de savoir dans quelle mesure cette 15e Inter-ecclésiale des CEB, dans sa forme actuelle, a exprimé et représenté le chemin réel et quotidien des communautés ecclésiales de base dans les différentes régions du Brésil.

Il est difficile de répondre à cette question. Probablement, durant cette réunion, des recherches ont été effectuées. Je ne les ai pas vues. Je ne sais pas quel est le pourcentage, parmi les participants, de personnes de la base, d’agents pastoraux et de militants des différents organes consultatifs. Sans aucun doute, beaucoup de participants de cet Inter-ecclésiale maintiennent vraiment le contact de présence et d’accompagnement de ce que nous pouvons appeler les CEB... Cependant, en tant que médecin capable de détecter une maladie par les symptômes que d’autres personnes ne remarqueraient même pas, je dois avouer que, derrière toute l’euphorie visible dans les danses et derrière les mots nombreux des séances plénières de la rencontre, j’ai ressenti une certaine agitation. La réalité derrière les rapports parus dans les plénières auxquelles j’ai eu accès m’a laissé l’impression qu’il semble y avoir un certain écart entre la réalité qui est apparue dans cette rencontre inter-ecclésiale et la réalité quotidienne des CEB dans la plupart des diocèses.

Quelqu’un a noté que, dans les groupes, les questions auxquelles il fallait répondre supposaient que les personnes présentes pouvaient répondre au nom des CEB. Des questions ont été posées sur l’impact de la réalité sociale et ecclésiale sur les CEB ou sur ce qui les anime aujourd’hui. Cependant, la plupart des personnes présentes à cette rencontre, en particulier les conseillers et le personnel travaillant dans les différentes pastorales sociales et les organisations de soutien, pouvaient-elles vraiment répondre à ces questions en tant que représentantes des CEB ?

J’ai entendu plusieurs évêques, dont les diocèses ont encore des CEB et qui ont été organisés à partir d’elles dans les années 80 et 90, que ce n’est plus la réalité aujourd’hui. D’après ce que j’ai entendu de plusieurs militants et même de certains évêques, responsables de diocèses qui, dans les années 90, étaient des références de CEB au Brésil, il semble que le plus grand ennemi des CEB au Brésil et du modèle d’Église qu’elles représentent soit le clergé.

Aujourd’hui, après que le pape François a dénoncé le cléricalisme comme un mal, tout le monde s’élève contre le cléricalisme. Cependant, il s’agit d’un phénomène avec différents visages et diverses expressions. Durant cette rencontre de Rondonópolis, j’ai l’impression que toutes les plénières ont souligné que le cléricalisme était le mal. Et pour celles et ceux qui ont dit cela, le sens concret était que la plupart des prêtres actuels de l’Église au Brésil n’acceptent pas et n’aiment ni les CEB ni les pastorales sociales.

En fait, à quelques exceptions près, il serait bon de faire une étude car certains diocèses qui précisément, dans le passé, étaient des références du « cheminement libérateur » et du protagonisme des laïcs, sont, en ce moment, ceux qui ont un clergé plus conservateur et réfractaire à toute proposition des CEB et du « cheminement libérateur »... Qu’est-ce que ça signifie ?

Aucun d’entre nous n’est en faveur de la paroissialisation des CEB, ni d’accord avec le fait que la CNBB rassemble tout au nom des « petites communautés ». La paroisse est une structure encore liée au modèle de l’Église chrétienne, organisée au Moyen-Âge et qui est arrivée dans notre pays avec la structure coloniale. Les CEB sont nées et se sont développées en dialogue avec la structure paroissiale, mais libres et indépendantes. Cependant, nous savons tous que dans la structure catholique actuelle, sans le soutien des curés et des paroisses, l’accès à la base devient plus difficile et sans continuité.

Nous pouvons opposer à cela la présence bonne et affectueuse de nombreux prêtres et évêques présents à cette rencontre inter-ecclésiale. Il semble que, lors de cette rencontre, les curés de paroisse et de la base étaient minoritaires. Une minorité brillante et forte, mais une minorité. La plupart des prêtres présents à la 15e Inter-ecclésiale étaient des accompagnateurs en pastorale sociale, des professeurs d’université et des théologiens. Cela explique peut-être la distance qui existe encore entre le type de liturgie, les chants et les sujets qui ont dominé une telle rencontre et la réalité des communautés dans les paroisses.

Même dans les années 1970 et 1980, le modèle de l’Église vécue dans les CEB a toujours été minoritaire. En tant que « minorités abrahamiques », elles ont toujours lutté avec difficulté. Cette rencontre de Rondonópolis montre que le « cheminement » persiste et résiste, malgré toutes les difficultés. Cependant, il semble que la reconstruction, peut-être, doive être plus libre par rapport au terrain institutionnel de l’Église catholique, ou du moins plus indépendante des paroisses.

Si cette intuition est correcte, les CEB seraient liées au cheminement social de la base, même si il est basé sur la foi et la spiritualité libératrice. Dans le domaine de la jeunesse, actuellement, le MEL (Mouvement des jeunesses et de la spiritualité libératrice) a pour proposition de développer la spiritualité libératrice (œcuménique), mais sans s’identifier à aucune Église. Se pourrait-il que, dans le même ordre d’idées, les CEB d’aujourd’hui deviennent des communautés de base plus humaines ou œcuméniques ? Pour être ecclésiales, il faudrait qu’elles soient moins ecclésiastiques et qu’elles assument vraiment le fait que la structure paroissiale de l’Église ne les assume pas correctement.

De toutes les rencontres inter-ecclésiales, depuis la 6e rencontre de Trindade (1986), celle-ci a eu le plus petit nombre de personnes d’autres Églises et presque aucune personne identifiée comme appartenant à une autre religion. Cela révèle la réalité de nos Églises dans leur vie quotidienne. Les relations œcuméniques ne s’improvisent pas. Malgré cela, la célébration œcuménique, le deuxième jour de la rencontre, a été remarquable. Elle s’est davantage concentrée sur le dialogue avec les cultures noires et indiennes que sur la convivialité entre les croyants des différentes Églises, mais elle a posé la question de l’œcuménisme de notre « cheminement libérateur ».

C’est un défi fondamental parce qu’il n’est pas seulement lié à des aspects concrets de la pastorale. Il révèle non seulement l’histoire et le fait que les rencontres inter-ecclésiales sont nées et se sont développées au sein d’une culture catholique romaine. Il révèle aussi que le modèle de l’Église encore en vigueur dans les rencontres inter-ecclésiales est encore attaché au modèle du christianisme. Et dans ce modèle, il n’y a pas de place pour l’œcuménisme, mais il n’y a pas non plus de place pour la laïcité des CEB qui devrait être le visage de l’Église dans le monde...

Voici un exemple d’une certaine ambiguïté : sur le mur de la Maison commune, site des grandes plénières de cette rencontre, il y avait une affiche réaffirmant qu’« agir en politique est la mission des laïcs comme tâche de transformation du monde ». Cela signifie que, même entre nous et dans l’ambiance du « cheminement libérateur », nous maintenons toujours ce dualisme qui légitime le cléricalisme. Si la mission de s’insérer dans le monde et d’agir dans la transformation du monde est de la responsabilité des laïcs, nous sommes d’accord que le terrain du sacré appartient à l’ordonné. Si nous l’affirmons nous-mêmes, de quel droit critiquerons-nous les prêtres qui ne veulent connaître que la liturgie et les tenues vestimentaires et ressembler à des prêtres des religions païennes ou du temple du premier testament ?

Quiconque a suivi certaines rencontres inter-ecclésiales, des années 1980 jusqu’au début de ce siècle, sait comment, dans les rencontres inter-ecclésiales, il y a eu des tensions et des difficultés de dialogue entre évêques et conseillers. À São Luís, Ilhéus et Ipatinga, il a toujours été nécessaire de prévoir, au cours de la rencontre, un bon moment de dialogue entre évêques et assesseurs pour dissiper les malentendus et avancer sur le chemin ecclésial. Cette fois, il n’y avait aucun signe de malaise ou de nécessité d’un dialogue spécial. Je ne sais pas si cela dénote le dépassement des difficultés, ou signifie que nous tous, évêques et assesseurs, nous vivons dans une réalité de l’Église où le fait même d’avoir une telle rencontre est déjà le maximum et où personne ne soulève plus de questions qui dérangeraient ecclésialement plus que la réalité qui déjà est elle-même troublante.

4.- Quelques perspectives

Les personnes qui sont allées à une rencontre inter-ecclésiale pour la première fois ont dû trouver merveilleux de voir des évêques, des prêtres, des religieux et des laïcs, hommes et femmes, ensemble dans une ronde d’égalité, danser en farandole ou suivre le train des CEB.

Encore une fois, la question porte sur la relation entre cela et la vie quotidienne de la pratique pastorale.

Dans le sud du Brésil, un groupe de religieux très ouverts a accompagné en solidarité les occupations du MST et les luttes sociales et politiques. Cependant, lorsque, à la fin de la journée, ces jeunes religieux sont retournés au couvent, ils ont semblé entrer dans la machine à remonter le temps du professeur Sparrow. Ils se déguisaient en religieux traditionnels, avec des vêtements, avec la liturgie et la dévotion commune de l’ordre. Ils ne semblaient pas se rendre compte de la schizophrénie spirituelle que cela représentait.

Avant, il était fréquent, en temps de « cheminement », de trouver des évêques qui, en dehors de leur diocèse, étaient simples, ouverts et solidaires, mais qui, quand ils rentraient dans leur Église locale, adoptaient des postures beaucoup plus conservatrices et autoritaires. Ce n’est probablement plus le cas aujourd’hui pour aucun évêque ou prêtre présent à cette rencontre. Cependant, la plupart d’entre eux ont des difficultés avec le clergé de leurs diocèses, ce qui empêche un « cheminement » ecclésial plus ouvert.

Si, dans cette rencontre de Rondonópolis, nous transmettions entre nous et au monde l’image d’une Église, plus ouverte et plus renouvelée dans son ensemble, non seulement nous ne serions pas fidèles à la réalité, mais, en donnant cette impression fausse ou superficielle, nous n’aiderions pas l’Église à se transformer plus profondément en Église synodale et en sortie (sortie vers les périphéries et vers le monde). Donner l’impression d’une plus grande ouverture, quand elle n’existe pas, est une plus grande trahison que d’assumer la réalité moins belle et moins agréable, mais plus vraie.

L’articulation des CEB, aujourd’hui, est plus nécessaire que jamais. Cependant, il faudrait qu’elle soit reprise par une équipe nationale qui serait disposée à une réanimation locale et régionale, en tant que mouvement national de caractère plus autonome par rapport aux paroisses et même aux diocèses, liée aux Églises locales mais avec une structure plus autonome et plus laïque et œcuménique, peut-être animée par le CONIC [4] et les entités sœurs qui peuvent, avec les pastorales sociales, assumer la tâche de donner une plus grande visibilité et plus de solidité aux communautés œcuméniques de base ou même aux communautés humaines de base.

Que le souffle de l’Amour divin nous éclaire et nous conduise sur les meilleurs chemins d’écoute, de dialogue et d’acceptation du règne divin parmi nous !


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 3672.
 Traduction de Pedro Picho pour Dial.
 Source (portugais) : [Portal das CEBs>https://portaldascebs.org.br/15o-intereclesial-de-cebs-bencaos-e-desafios/], 21 août 2023.

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[2Conférence nationale des évêques du Brésil – NdT.

[3Caminhada en portugais renvoie à la marche, au cheminement. Expression courante au Brésil et difficile à traduire en français parce qu’elle fait référence à la voie des premières communautés chrétiennes en même temps qu’à cette nouvelle forme d’Église mise en œuvre par les communautés de base et sous l’inspiration de la théologie de la libération – NdT.

[4CONIC : Conseil national des Églises chrétiennes du Brésil – NdT.

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