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DIAL 3551

COLOMBIE - Une caravane d’anciens combattants est arrivée à Bogotá : « Duque, faites stopper les assassinats ! »

Juan Carlos Hurtado Fonseca

mercredi 25 novembre 2020, mis en ligne par Dial

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

En septembre, DIAL publiait un texte présentant un tableau plutôt sombre de la situation en Colombie, analysée à partir des élites politiques. Cet article de Juan Carlos Hurtado Fonseca, publié le 3 novembre 2020 par l’Agence Prensa Rural, présente lui les mobilisations des anciens combattants pour lutter contre la vague d’assassinats et de violence qui touche dirigeants sociaux et anciens combattants depuis la conclusion des accords de paix en 2016.


« L’avenir de la Colombie ne peut être l’avenir de la guerre. Nous avons signé un accord de paix non pas pour qu’on nous assassine mais pour que soient garanties la sécurité, le droit à la vie. Nos enfants méritent de vivre dans un pays en paix. Le moment est venu d’extirper de nos cœurs la haine et la rancœur. La paix ne peut pas continuer à nous coûter la vie. » Ainsi s’est exprimée l’ancienne combattante Deisy Arango au début de sa marche, dans le département du Meta.

Dans ce but, des lieux les plus reculés de la Colombie profonde, plus de mille signataires de l’accord de paix entre l’ex-guérilla des Farc et l’État colombien ont entrepris une marche qui les a menés dimanche 1er novembre à Bogotá, dans l’intention d’alerter sur la situation de vulnérabilité et de victimisation dans laquelle les ont mis ceux qui les assassinent ainsi que le gouvernement d’Iván Duque qui ne respecte pas pleinement l’accord.

C’est ainsi que, partis de régions comme la Caraïbe ou l’Amazonie, ou des départements de Cauca, Meta, Tolima et Nariño, entre autres, fatigués des manquements du gouvernement, des centaines d’anciens combattants ont entamé il y a quelques jours une marche durant laquelle plusieurs villes et villages leur ont manifesté leur solidarité et leur soutien. À leur arrivée à Bogotá, ils ont exigé du gouvernement national qu’il respecte les accords et mette fin aux massacres de paysans ainsi qu’aux assassinats de dirigeants de mouvements sociaux et d’anciens combattants.

Le fait est que depuis 2016, lorsqu’ils acceptèrent de faire de la politique sans armes, 236 signataires de l’accord, qui espéraient trouver un emploi ou participer à des projets productifs, ont été exécutés. Ils ont été assassinés par ceux qui trahissent les accords de paix et font obstacle à la construction d’une société démocratique et en paix.

Pour toutes ces raisons, ils ont été reçus dans la capitale du pays par des citoyens, des organisations sociales et des dirigeants politiques comme Iván Cepeda et Ángela María Robledo, qui les ont soutenus dans leurs revendications et ont demandé au gouvernement de faire cesser le bain de sang que vit le pays.

Équipés de drapeaux blancs, de ceux de leur parti, du drapeau tricolore national, de déguisements et de pancartes sur lesquelles ils exigeaient la paix et affichaient les noms de leurs camarades assassinés, ils se sont déployés en deux défilés dans de grandes avenues de Bogotá pour gagner la place Bolívar.

La paix : un dessein national

Au moment du rassemblement, avant la traversée du centre-ville, devant le monument au sénateur Manuel Cepeda Vargas, immolé par l’État, le maire de Kennedy [1] du parti Colombia Humana – UP, Juan Carlos Realpe Ovalle, a déclaré : « Ivan Duque et son parti, actuellement au pouvoir, ne manifestent pas encore une volonté profonde et réelle de mettre en œuvre l’accord ; au contraire, ils ont révélé la vraie politique qui est la leur : poursuivre, dénoncer et refuser. Nous espérons que les enquêtes en cours permettront de connaître et poursuivre les responsables ; de même. Nous ne sentons chez eux aucune disposition pour faire cesser le massacre. »

« La paix est un dessein national. Nous ne pouvons accepter qu’un groupe politique impose la guerre, la négation et l’oubli, alors que la majorité du pays souffre de la faim, de la spoliation et de l’incertitude. »

Le dirigeant politique du 8e district de Bogotá a expliqué qu’à partir des secteurs urbains qui sont les leurs, ils entendent participer à la formation d’un mouvement national de défense de la paix et feront pression pour que s’élargisse la perspective d’une paix complète associée à une justice sociale fondée sur l’être humain, le bonheur et les transformations que la Colombie mérite.

Malgré les persécutions et les assassinats, les anciens combattants ont manifesté clairement leur attachement à la paix et leur engagement pour la construction d’une société juste et démocratique. « L’assassinat d’Albeiro a secoué la population des plaines orientales mais également la conscience démocratique du pays », a déclaré Ricardo Tellez, qui est venu à pied de cette région.

Les marcheurs ont rempli leur mission : attirer l’attention de la société et du gouvernement national pour que soit respecté ce qui a été convenu avec eux et pour que les accords soient vraiment appliqués : « Nous avons abandonné les armes en accordant confiance à la parole de l’État et nous demandons des garanties pour notre vie, pour notre réinsertion socioéconomique et pour notre participation politique », a déclaré en conclusion à Bogotá le sénateur du parti FARC, Carlos Antonio Lozada.


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – D 3551.
 Traduction de Gilles Renaud pour Dial.
 Source (espagnol) : Agencia Prensa Rural, 3 novembre 2020.

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[1Kennedy est le 8e district de Bogotá, il est situé au sud de la capitale – note DIAL.

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