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L’actualité en bref - juin 2004

Nicolas Pinet

jeudi 1er juillet 2004, mis en ligne par Dial, Nicolas Pinet

AMÉRIQUE LATINE

Une réunion ministérielle du Groupe des 20 pays en voie de développement (G-20) qui s’oppose à la pratique des subventions agricoles des Etats-Unis, de l’Union européenne et du Japon, était organisée à São Paulo le 12 juin. Elle a été l’occasion d’un renforcement de l’unité du groupe et d’un début de rapprochement avec le Groupe des pays des 90 (G-90), formé lui aussi à Cancún lors de la dernière conférence ministérielle de l’OMC et qui réunit les pays qui s’opposent aux tentatives des Etats-Unis et de l’Union européenne d’inclure dans les négociations commerciales les « thèmes de Singapour », c’est-à-dire les services, les investissements, les achats gouvernementaux et la propriété intellectuelle. Un représentant du G-90, Clément Rohee, ministre de la coopération et du commerce de Guyana, était présent lors de la réunion. De même, le ministre des affaires étrangères brésilien, Celso Amorim représentait le G-20 lors de la réunion ministérielle du G-90, le 3 juin en Guyana.

Un rapport publié à la mi-juin par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), basée à Genève, fait apparaître une augmentation spectaculaire de l’immigration en provenance de l’Amérique latine et des Caraïbes et à destination de l’Europe, en particulier de l’Espagne, de l’Italie, du Portugal et de la Grande-Bretagne. La majorité des immigrants est arrivée durant ces 3 dernières années, du fait notamment de la crise économique en Amérique latine, et du renforcement des contrôles migratoires et du durcissement du régime des visas vers les Etats-Unis, après les attentats du 11 septembre 2001.

Lors de la IXème Conférence régionale sur la femme en Amérique latine et aux Caraïbes, qui s’est tenu à la mi-juin à Mexico, les Etats-Unis et des groupes conservateurs ont fait pression sans succès sur diverses délégations pour que ne soit pas inclus dans la déclaration finale les termes « droits sexuels et reproductifs » qu’ils considèrent incitatifs à l’avortement. Dans la déclaration nommée « Consensus de Mexico », la région s’est engagée à « réviser et mettre en place des lois garantissant l’exercice responsable des droits sexuels et reproductifs et l’accès sans discrimination aux services de santé, y compris de santé sexuelle et reproductive ».

ARGENTINE

Un officier de l’armée active, le lieutenant colonel Guillermo Bruno Laborda, a confessé début juin sa participation, dans la région de Córdoba, à l’assassinat de détenus durant la dictature (1976-1983). Il a fourni des détails considérés fondamentaux par les avocats des victimes qui ne disposaient pas jusque là de témoignage d’un tel poids sur ces crimes.

Le produit intérieur brut (PIB) argentin chuta de 19,6% de 1999 à fin 2002, date à laquelle l’activité économique du pays commença à reprendre de l’ampleur. En 2003, il croissait de 8,7%. En 2004, les prévisions laissent attendre une croissance du PIB de 5 à 7%, marquant une stabilisation après une forte reprise postérieure à la crise.

Un mois après la mise en place du plan officiel destiné à solutionner la crise énergétique déclenchée par l’augmentation de la demande due à la reprise et à la faiblesse de l’offre par manque d’investissements des entreprises privées productrices de gaz naturel, la situation semble stabilisée. Mais le système fonctionne à son maximum, et ne permettrait pas de faire face à un surplus de demande si un imprévu surgissait.

BOLIVIE

Le président bolivien, Carlos Mesa, est décidé à consulter la population par référendum dimanche 18 juillet au sujet de la gestion des richesses en hydrocarbures du pays, malgré l’opposition de la Centrale ouvrière bolivienne (COB) et du Comité civique pro Santa Cruz, qui défend les intérêts des entreprises et des régions de l’est du pays. Le ministre des mines et hydrocarbures, Xavier Nogales a démissionné de ses fonctions fin mai, à la demande du président, après avoir exprimé son désaccord sur le contenu des questions du référendum qu’il trouvent peu claires et ambiguës, incitant à répondre « oui ». Il a été remplacé par Guillermo Torres.

Le maire du village altiplanique de Ayo Ayo, à 81 km de La Paz a été retrouvé mort, son corps portant des traces de tortures et de brûlures, sur la place d’armes de son village, après avoir été séquestré à La Paz. Benjamin Altamirano avait été accusé de corruption, mais acquitté par la justice. Le village compte 7 000 habitants indigènes dispersés en 11 communautés et estancias. Les communautés aymaras ont pour coutume d’appliquer des châtiments aux autorités locales considérées incapables ou vénales (coups de fouet, déambulation à dos d’âne des autorités fautives…), mais la cruauté du crime a provoqué la condamnation des autorités centrales et soulevé quelques doutes sur les auteurs du meurtre. Le malku (chef originaire) de Ayo Ayo, a déploré la mort d’Altamirano et déclaré que le meurtre d’une personne n’était pas au nombre des châtiments prévus par la justice indigène. Pour une chercheuse d’une ONG travaillant sur le terrain, il s’agirait plutôt d’une lutte de pouvoir entre partis politiques en vue des élections de gouvernements locaux en décembre 2004, se servant de la justice communautaire pour déguiser leurs actes.

BRÉSIL

Le refus du Sénat de fixer le nouveau salaire minimum à 83 dollars, comme le proposait le gouvernement, constitue la plus grande défaite politique du président Luiz Inácio Lula da Silva depuis son accession au pouvoir. La valeur de 88 dollars fixée, vendredi 18 juin, par la Chambre Haute représente en outre une formidable charge supplémentaire pour le système de prévision social brésilien, déjà déficitaire. Le salaire minimum sert en effet de base à tous les réajustements des prestations de la sécurité sociale.

CHILI

Vendredi 4 et samedi 5 juin se réunissaient à Pucón, au sud du Chili, les ministres du commerce des pays qui participeront au Forum de Coopération économique Asie-Pacifique (dit APEC, pour son sigle anglais) prévu pour novembre 2004, à Santiago. Etaient notamment présents le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et le responsable du commerce états-unien, Robert Zoellick. Parallèlement s’est tenue une rencontre intitulée « Le peuple mapuche et les organisations sociales contre l’APEC ».

Un projet rendant obligatoire la publication des 143 lois secrètes promulguées pendant la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990) a été approuvé, mardi 15 juin, par 101 votes en faveur et une abstention par la chambre des députés. Avant d’être ratifié par le Sénat, le projet devra cependant repasser par la commission de défense du Parlement qui avait approuvé le projet en mai tout en maintenant secrètes 32 lois, considérant que leur divulgation affecterait la sécurité du pays. Viviana Díaz, la secrétaire général de l’Association des parents de détenus-disparus (AFDD pour ses sigles en espagnol), a exprimé sa satisfaction au sujet du vote et demandé que soient rendues publiques l’ensemble des lois de la dictature.

COLOMBIE

La presse colombienne commence à évoquer la mise en place d’une vaste opération militaire, nommée Plan Patriote, destinée à lutter contre la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) dans le sud du pays. Selon les informations diffusées par la presse, l’opération s’appuierait sur quelque 17 000 soldats colombiens entraînés, conseillés et équipés par des instructeurs états-uniens. Le Bureau de Washington sur l’Amérique latine (Washington Office on Latin America – WOLA) a envoyé le 14 mai un mémorandum au Congrès états-unien déclarant que « le Plan Patriote marque l’entrée des Etats-Unis dans une nouvelle phase, plus intense, de participation militaire dans le conflit armé colombien ». L’organisation, qui fait campagne auprès du Congrès pour qu’il n’autorise pas une augmentation de la présence militaire états-unienne en Colombie, affirme que, à la différence du Plan Colombie, le Plan Patriote, exclusivement militaire, ne prévoit pas d’amplifier la lutte antidrogue qui justifiait la participation états-unienne.

CUBA

La production de sucre, principale production primaire du pays, est passée de 2,2 millions de tonnes en 2003 à 2,5 millions de tonnes en 2004, sans atteindre cependant les chiffres prévus. Si l’on ajoute à cela le prix élevé du pétrole, la sécheresse persistante et l’intensification de l’embargo états-unien, les perspectives de l’économie cubaine sont plutôt sombres. La conjonction de ces facteurs augmente les problèmes financiers de l’île et retarde le processus de récupération de la crise des années 1990.

ÉQUATEUR

Début juin, la XXXIVe Assemblée générale de l’Organisation des Etats américains (OEA) à Quito a été l’occasion d’importantes manifestations de la part de groupes indigènes et d’autres organisations sociales et politiques réunies pour exprimer leur mécontentement face à la politique suivie par Lucio Guttiérrez, élu avec le soutien de la Confédération des nationalités indigènes d’Equateur (CONAIE). La CONAIE a aussi organisé des barrages routiers dans divers endroits du pays.

GUATEMALA

Mardi 8 juin, une centaine d’organisations sociales de paysans, de petits commerçants et de syndicats réalisaient avec succès une journée de grève générale qui paralysa une grande partie du pays. Le président Oscar Berger, au pouvoir depuis 6 mois, avait menacé d’utiliser la force pour réprimer le mouvement, mais, face au succès de l’initiative, il acceptait de dialoguer avec les organisations sociales, mardi soir. Après plusieurs heures de négociation, un accord était trouvé et la grève suspendue. Les organisations sociales demandaient de mettre fin aux expulsions violentes des paysans qui occupent des terres privées, de suspendre les projets du gouvernement d’une hausse des impôts et de réviser l’accord de libre-échange signé fin mai avec les Etats-Unis.

HAÏTI

Les 15 petits Etats des Caraïbes, regroupés au sein du CARICOM maintiennent leur exigence d’une enquête sur les conditions de la chute de l’ancien président haïtien. Mardi 8 juin, l’assemblée de l’Organisation des Etats américains (OEA), réunie du 6 au 8 juin à Quito, adoptait, sur leur proposition, une résolution qui ouvre la possibilité d’une enquête.

Un Cadre de coopération intérimaire (CCI) a été élaboré durant 6 semaines par un groupe d’experts dont la majorité provient d’institutions comme l’Agence pour le développement international, des Etats-Unis, et la Banque mondiale. Le plan, d’orientation économique néolibérale, propose des privatisations, l’installation de nouvelles zones franches, le développement du tourisme et des exportations agricoles. Ce document publié début juin servira de base aux discussions lors de la « Conférence d’engagement », qui se tiendra le 19 et 20 juillet à Washington et réunira des représentants du gouvernement d’Haïti et de la communauté internationale des donateurs.

PARAGUAY

L’ancien général Lino César Oviedo, condamné à 10 ans de prison pour une tentative de coup d’Etat contre l’ancien président Juan Carlos Wasmosy (1994-1998), accusé d’être l’auteur intellectuel de l’assassinat de l’ancien président Luis María Argaña (en mars 1999) et de 8 étudiants tués lors des manifestations qui avaient suivi l’assassinat – le « mars paraguayen » – est rentré au Paraguay fin juin pour que, si on en croit ses dires, la lumière se fasse sur l’assassinat de Argaña. Il vivait au Brésil depuis 2000. Selon de nouveaux témoignages, Argaña ne serait pas mort par balle dans sa voiture, comme l’ont établi l’autopsie et l’enquête officielle, mais d’un infarctus lors d’une visite chez une amante. La famille du défunt et la Cour considèrent qu’Oviedo a préparé l’apparition de ses « révélations ».

EL SALVADOR

Mardi 1er juin, Antonio Elías Saca, de l’Alliance républicaine nationale (ARENA) prenait ses fonctions à la présidence (pour 5 ans). Il avait été élu en mars, face au candidat du Front Farabundo Martí pour la libération nationale (FMLN), Schafik Nadal. L’ARENA, au pouvoir depuis 15 ans, disposera de 27 sièges au Parlement contre 31 pour le FMLN, sur un total de 84. Le jour de la prise de fonctions, des milliers de sympathisants du FMLN manifestaient dans les rues de la capitale accusant le nouveau gouvernement d’être néolibéral et de suivre les recettes économiques de Washington et des organismes financiers internationaux.

VENEZUELA

Le Conseil nacional électoral (CNE) a fait savoir, jeudi 3 juin, que la coalition de l’opposition avait dépassé le quorum minimum de 2 436 083 signatures et que le référendum aurait donc bien lieu. La date en a été fixée au 15 août. La demande qui sera faite aux 12,5 millions d’électeurs sera la suivante : « êtes-vous d’accord de laisser sans effet le mandat populaire octroyé par le biais d’élections démocratiques légitimes au citoyen Hugo Rafael Chávez Frías comme président de la république bolivarienne du Venezuela pour la période présidentielle actuelle ? » Si le mandat de Chávez est révoqué, le vice-président, José Vicente Rangel, assumera le pouvoir et des élections seront organisées dans les 30 jours suivants.


 Dial – Diffusion de l’information sur l’Amérique latine – L’actualité en bref.

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